La législation statutaire des communes italiennes
« Atene e Lacedemona, che fenno
l’antiche leggi e furon sì civili,
fecero al viver bene un piccol cenno
verso di te, che fai tanto sottili
provedimenti, ch’a mezzo novembre
non giugne quel che tu d’ottobre fili »
(Dante Alighieri, Purgatorio, VI, vv. 139-144)
Monde communal et législation statutaire : un binôme très étroit
Dans la seconde moitié du XIIIe siècle, les villes d’Italie centrale et septentrionale achevèrent le processus de recomposition territoriale entrepris deux siècles plus tôt. À l’issue de ce processus, les villes s’étaient considérablement renforcées : elles gouvernaient par leurs magistrats le territoire urbain et l’espace rural extérieur au faubourg (le contado), et elles établissaient des relations et des alliances avec les pouvoirs environnants. De plus, ces centres urbains se sont imposés comme des acteurs politiques et institutionnels de premier plan, capables de rivaliser avec des pouvoirs qui leur étaient, en droit, supérieurs, tels que le Saint-Empire et la papauté.
Les villes dominaient, presque seules, la scène politique de leur territoire. D’un point de vue juridique, on peut dire qu’au XIIIe siècle, elles avaient acquis une pleine personnalité juridique : c’était l’objectif que les classes dirigeantes locales s’étaient fixées (avec plus ou moins de conscience) au moment de la constitution du nouvel ordre public à base territoriale entre la fin du XIe siècle et le milieu du XIIe siècle.
Ce n’est pas le lieu ici de rappeler la question de l’origine de l’autonomie des communes italiennes, sur laquelle l’historiographie est depuis longtemps divisée. Il est cependant utile de s’attarder sur le nom que les classes dirigeantes locales donnèrent au nouvel ordre, initialement désigné sous le nom de civitas. Le terme choisi pour les actes officiels est « commune », un nom inventé ex novo, dérivé de l’attribut latin communis/e. Il ne s’agit pas d’une question de terminologie : le terme latin de commune désigne le nouvel ordre créé par la volonté des classes citoyennes, car il le distingue de tous les autres ordres sur le territoire urbain. En même temps, le même terme exprimait et résumait (comme le suggérait Ottavio Banti) la notion de concorde et d’unité (concordia civium), proclamée comme une valeur. La civitas se fonde sur cette notion et aspire à absorber progressivement tous les sujets de la ville (Banti, 1972 ; Bordone, 1986 ; Faini, 2021).
Le succès des communes repose sur l’adoption d’un nouveau système de relations entre les cives. L’obtention de la pax publica, entendue comme un espace de pacification, est le devoir principal, voire constitutif, de la commune (Vallerani, 2007 ; Zorzi, 2008). Celle-ci s’employait à la fois à régler les conflits internes (entre les individus, les familles, les divers groupements politiques, factionnelles et professionnelles) et à faire respecter les décisions des juges pris à l’issue des procès ou des concordie d’intérêt public entre les citoyens (Menzinger, 2006b). Le thème de la pacification interne apparaît dès les premières preuves documentaires des règlements communaux, dans les brevia (serments prêtés par les magistrats communaux) et dans les tout premiers recueils de règles établies par la commune, c’est-à-dire les statuts communaux du XIIe siècle. Même les formes institutionnelles que la commune s’est progressivement données avaient, en fin de compte, pour objectif de réduire les tensions internes entre les différentes composantes de la communauté : le système devait à la fois être ouvert à la participation politique des nouvelles classes urbaines et permettre aux organes publics d’exercer un contrôle hiérarchique efficace sur les cives, même s’il était exercé au nom de la communauté (Vallerani, 2011).
Ainsi, dans l’intérêt collectif de la promotion et de la protection de la pax et l’unitas de la ville, les organes de la commune agissent pour préserver l’équilibre social en gérant les conflits sur la base des normes et procédures publiques, partagées et contrôlables. Les régimes communaux de la ville étaient fondés sur un véritable paradigme procédural de défense de l’ordre public et des droits des cives, principalement des droits de propriété (Milani, 2005).
Pressées d’agir sur le plan juridique, les communes ont eu recours à la médiation de juristes pour traduire et mettre par écrit (les règles de) l’action politique quotidienne. Les juristes ont été chargés de rédiger et de mettre à jour le statut de la ville, loi fondamentale de la communauté politique (Menzinger, 2006a). La collaboration et la tension entre la politique (les représentants du gouvernement de la ville) et le droit (les juristes) ont certainement été l’un des aspects déterminants de toute l’histoire communale depuis le début de l’ère communale. En effet, la quête de normativité législative s’est accrue au fil du temps, pour atteindre son apogée au XIIIe siècle, à l’époque de la soi-disante « commune mature » ou commune populaire, lorsque les nouvelles couches sociales arrivées au sommet des institutions citadines (il Popolo) promeuvent des formes de participation à la vie politique et des modes de résolution des différends inspirés (si est permis l’anachronisme) aux principes de la légalité.
Il convient également de rappeler que, parallèlement aux communes urbaines, de nombreuses communautés rurales ont également pris la forme d’institutions communales. Les textes réglementaires de ces universitates rurales (statuts ruraux et autres types de chartes réglementaires) présentaient des caractéristiques différentes de celles des villes tant dans leur genèse que dans leur contenu.
En revanche, les compilations de textes normatifs et réglementaires des pôles castraux et ruraux dépendant d’autorités seigneuriales laïques ou ecclésiastiques ou de civitates dominantes avaient un caractère essentiellement contractuel. Ces textes normatifs n’étaient pas des statuts au sens strict, si l’on entend par ce terme principalement, bien que non exclusivement, des règles émanant des organes délibératifs de la collectivité (nous reviendrons sur ce point). Il s’agissait pour la plupart de négociations normatives par lesquelles les parties – le seigneur et les habitants de la communauté, rurale ou castrale – s’engageaient mutuellement à réguler leurs comportements futurs. Le contenu de ces textes normatifs était fortement influencé par le degré d’autorité effectivement exercée par les seigneurs (Salvestrini, 2009).
Les modalités de rédaction, notamment pour les statuts les plus anciens, rendent souvent difficile leur classement dans la bipartition typologique générale proposée à l’époque par Enrico Besta. Ce dernier distinguait des statuts accordés (concessions du seigneur) les statuts négociés (entre le seigneur et la communauté). Ontologiquement distincts de ceux-ci étaient les statuts proprement dits, c’est-à-dire les normes instituées que la commune se donnait à elle-même en vertu de sa propre autonomie (Besta, 1925).
Malgré la grande diversité des types textuels, les nouveaux pouvoirs territoriaux partageaient l’idée que la mise par écrit officielle des normes, confiée initialement à des praticiens, essentiellement des juges et des notaires, garantissait la certification du droit. La rédaction des normes juridiques, en effet, donnait force de loi à certaines règles de droit privé de tradition coutumière (en en laissant d’autres tomber en désuétude) et garantissait le caractère non arbitraire des processus d’élévation des citoyens aux charges publiques. Cela favorisait également le passage de la justice négociée (basée sur le consensus et l’oralité) à la justice publique (« constitutionnalisée » par les statuts) pour des répressions de conduites dangereuses pour la collectivité (Sbriccoli, 1998). Le triomphe de la culture de l’écrit (qui dans les communes ne fut pas immédiat, comme l’a souligné Hagen Keller, et s’affirme définitivement à partir du XIIIe siècle) se traduisit aussi dans l’obligation de l’enregistrement notarié des actes et dans la conservation des archives. Un tel triomphe fut largement favorisé par la réception de la tradition romaniste, qui se répandit également en dehors des milieux académiques (Keller, 1988 et 2001 ; Ascheri, 2000 et 2013 ; Faini, 2013 ; Cammarosano, 2021).
Dans l’Italie du Centre-Nord et le Midi de la France, on assista, en l’espace de quelques décennies, d’abord à la rédaction écrite des normes coutumières locales, puis à la rédaction des statuts communaux, destinés à devenir la source principale du droit communal, après avoir souvent coexisté, jusqu’au début du XIIIe siècle, avec les coutumes. Nous traiterons maintenant de l’affirmation des statuts communaux en détail.
Il faut cependant d’abord informer le lecteur, même rapidement, que le phénomène statutaire a également trouvé une grande fortune en dehors du monde communal. Les universitates du royaume de l’Italie méridionale, en particulier, ont produit d’importants corpus de normes communales avec des caractères originaux par rapport au modèle communal : cette originalité se reconnaît, entre autres choses, dans le rapport des communautés avec le pouvoir royal pour l’édiction des textes normatifs, dans les matières concernées (principalement le droit privé) et selon une chronologie retardée (Calasso, 1929 ; Caravale, 1984 ; Terenzi, 2019 et 2022 ; notamment pour la Sicile : La Mantia, 1900 ; Romano, 1990 et 1993 ; Corrao, 1995 ; Titone, 2018).
Statutum/Statuta
Le statut est le livre officiel dans lequel les communautés politiques urbaines et rurales ont rassemblé les différentes dispositions locales pour réglementer la vie civile. Ce type de registre a pris de l’importance et des dimensions considérables surtout dans les villes du Centre et du Nord de l’Italie, dans le Midi de la France, mais aussi en Flandre et dans les villes libres d’Allemagne, c’est-à-dire dans les régions d’Europe qui ont connu une nouvelle réalité institutionnelle communale à partir du XIe siècle (pour les différences entre l’expérience de la législation urbaine en Italie et en Allemagne, voir Dilcher, 1991 et 2001).
Le mot « statut » (statutum) dérive du verbe latin statuere, qui signifie « établir », « ordonner », « délibérer ». Dans son sens le plus propre, le terme de statutum désigne la décision prise par la seule délibération de la communauté (Caprioli, 1988 et 1991). Les dispositions approuvées par les assemblées communales portaient en effet la formule initiale « statutum est » (« est décrété », « est établi ») (Fiorelli, 1998). Cette formule subsistait parfois même après la transposition du statutum dans le livre des statuts communaux, à savoir après la transformation de la résolution de l’assemblée en chapitre. Ainsi, le mot « statut », au sens actuel de « livre où sont rassemblées les dispositions communales » est une synecdoque, à savoir un nom singulier (statutum) désignant l’ensemble des dispositions (statuta) rassemblées dans un recueil de normes communales. On constate cependant que l’emploi du mot statuta est attesté, à l’époque précommunale, aussi bien dans les sources du droit romain, pour désigner les dispositions (Codex, Digeste), que dans les sources ecclésiastiques, pour désigner les canons conciliaires (Bambi, 1991).
À partir du XIIIe siècle, le mot « statuto » est le plus répandu pour désigner le corpus des dispositions de la ville. Avec la même signification, on utilise aussi « constituto » (constitutum), une variante enracinée dans le vocabulaire juridique romain très répandue en Italie centrale, en particulier en Toscane et en Ombrie.
Il convient de souligner que le statut communal n’inclut pas seulement les dispositions de la tradition délibérative, mais aussi les règlements d’autres sources préexistantes à l’époque de sa rédaction. En outre, toutes les dispositions régissant la vie de l’ordre communal n’étaient pas contenues dans le statut. Il faut au moins mentionner les Libri iurium et d’autres collections documentaires similaires (aux noms particulièrement variés), qui contenaient non seulement des documents historiques pour les relations extérieures, mais aussi des documents historiques pour l’intérieur de la commune. Procédons dans l’ordre.
Autonomie, iurisdictio et égislation statutaire
Comme nous l’avons mentionné dans l’introduction, à partir du XIe siècle, les habitants des villes se sont soustraits aux pouvoirs supérieurs. Certains communes, influencés par le renouveau de la culture romaniste, s’auto-définissent ouvertement comme des res publicae (Conte, 2008). Ces villes acquièrent progressivement leur individualité politico-juridique, cette condition de libertas constituée par une pleine capacité d’autogouvernement (Cortese, 1995). Le terme par lequel les sources médiévales indiquent cette condition est celui de iurisdictio (sur la sémantique de iurisdictio, liée au gouvernement autonome de la commune, voir Costa, 2014). La pleine possession de la iurisdictio était étroitement liée au pouvoir de réglementation. Les communes exercent ce pouvoir d’une part avec la production d’une législation ordinaire (les délibérations de l’assemblée), et d’autre part avec la compilation du statut, qui représentait sa plus haute expression.
Les dispositions contenues dans le statut sont chargées d’une signification politique. L’élaboration du statut s’inscrit dans le cadre des conflits entre groupes élitaires économiques et politiques au sein des communautés de la ville pour le contrôle de la commune. En tant que produit d’une organisation juridique, le statut représentait en fait le programme d’action politique des groupes vainqueurs de ces luttes. Comme on l’a écrit avec autorité, le statut n’était pas seulement le résultat, mais il représentait aussi l’instrument de ces luttes (Sbriccoli, 1969) : il cristallise les arrangements de pouvoir obtenus et, en même temps, établit un modèle d’ordre pour la communauté politique. Ainsi, d’un point de vue purement constitutionnel, le statut communal joue le rôle de charte fondamentale rédigée au sortir de conflits sociopolitiques.
Les contemporains étaient pleinement conscients de la fonction assumée localement par le statut. Afin de légitimer cette nouvelle source, la science juridique a cherché le fondement théorique du pouvoir qui permettait aux communes de créer des corpus de lois s’imposant à tous les habitants. Nous aborderons plus loin le sujet de la potestas condendi statuta et de ce que l’on appelle la « doctrine des statuts ». Attardons nous d’abord sur leur formation matérielle.
Les voies de la constitution des statuts communaux
Les corpus de statuts ont été formés au cours d’un long processus, avec des résultats qui varient considérablement d’une commune à l’autre, tout comme les documents réglementaires antérieurs qui ont alimenté le texte, en plus des délibérations ex novo des assemblées communales. Même la chronologie de la publication des recueils n’était pas uniforme : les événements politiques et sociaux des différentes communautés conditionnaient le moment de la compilation. Malgré la très large diffusion de la nouvelle source, il existe aussi des cas (rares mais pas inhabituels) de petites villes qui n’ont pas procédé à l’élaboration de leurs propres statuts.
Le premier aspect à considérer est donc la singularité du statut. Chaque source de ce type doit être étudiée dans le contexte de l’histoire de la ville où elle a été formée et où elle a déployé son efficacité. Néanmoins, malgré la diversité des études de cas, il est possible de formuler quelques considérations générales sur le sujet.
Les statutari, praticiens et compilateurs du droit communal
Commençons par les artisans matériels de la compilation. Les assemblées communales déléguaient la compilation du corpus législatif local aux statutari. Il s’agit de citoyens, pour la plupart praticiens du droit (notaires et juges, plus rarement doctores), qui se réunissent en commissions spéciales pour rédiger le texte à soumettre à l’approbation des organes politiques de la commune. La composition et les critères d’élection des assemblées de ces citoyens-législateurs sont soigneusement définis, compte tenu de la délicatesse de la tâche. La préoccupation principale était de s’assurer que des représentants de tous les quartiers de la ville (quartieri, sestieri, etc.) soient présents dans la commission. Dans une phase plus avancée de l’histoire communale du milieu du XIIIe siècle au XVe siècle, les communes confient la révision et l’examen de la validité des dispositions à des magistrats ordinaires, les reformatores et les emendatores, qui obtiennent parfois une délégation législative. Il existe des cas bien connus de villes qui ont confié à d’illustres juristes, même étrangers, le soin de donner une forme organique à des ensembles réglementaires : le bolonais Iacobus Balduini se charge des statuts de 1229 de la ville de Gênes (Piergiovanni, 1980 ; Sarti, 1990), Albericus de Rosate donne forme aux statuts de 1331 et 1333 de Bergame (Storti, 1984) et Paulus de Castro se charge des statuts florentins de 1409 et 1415 (Tanzini, 2004).
La mise par écrit de la coutume communale
Le thème de la genèse des statuts a suscité un grand intérêt dans l’historiographie juridique, qui a toujours considéré la législation communale comme un élément essentiel de son champ d’investigation. Les historiens du droit italien de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle ont schématiquement distingué trois « éléments constitutifs » à l’origine du statut (ou trois « facteurs » selon le lexique positiviste en vogue à l’époque) : la coutume, les brevia et les délibérations du conseil, c’est-à-dire les statuta proprement dits (Schupfer, 1892 ; Solmi, 1908 ; Besta, 1925).
La coutume (diversement appelée dans la documentation : consuetudo, usus, mores) est l’élément formant la plus ancienne partie des statuts. Elle consiste en des comportements qui perdurent dans le temps, enracinés dans un consensus collectif, et qui acquièrent une force normative. En général, les coutumes des villes régissaient les questions de droit privé, tant substantielles que procédurales, principalement dans le domaine des droits patrimoniaux. La discipline procédurale coutumière s’appuyait assez souvent sur les décisions des tribunaux de la ville (iudicia, selon le langage utilisé par la commune des origines au début XIIe siècle), transformées en règles stables ou résumées sous la forme de règles de droit. Mais la casuistique est très variée. Les coutumes ont également été l’un des vecteurs par lesquels certaines règles du droit civil romain, dont la communauté a fait siennes au début du Moyen Âge, ont été introduites dans les écrits réglementaires communaux, prenant ainsi une forme législative. C’est un phénomène de transposition et d’incrustation normative qui a conduit Francesco Calasso, le grand maître de l’histoire du droit, à voir dans le droit communal « le droit roman (une expression inspirée des ‘langues romanes’), codifié dans la législation statutaire prodigieusement riche » (« il diritto romanzo, codificato nella prodigiosamente ricca legislazione statutaria ») (Calasso, 1951 ; sur lequel les annotations de Caprioli, 1988).
À partir du milieu du XIIe siècle, de nombreuses communes d’Italie centrale et septentrionale, en particulier les plus grandes, ont commencé à mettre par écrit des coutumes locales, à la confluence de cette renaissance de la culture juridique, du développement de l’activité d’écriture par des professionnels du droit (juges, notaires, doctores) et de l’activisme de la classe dirigeante à la tête des premières communes (Faini, 2013 et 2016).
Les communes naissantes ressentent le besoin de créer une tradition juridique unifiée et de soumettre à leurs propres règles, notamment celles des procédures, tous les sujets du territoire urbain et du contado. Les intentions politiques et juridiques se confondent. En effet, il ne faut pas oublier qu’à cette époque, le conflit avec l’Empire était en cours et que parmi les revendications des communes lombardes figurait la reconnaissance de leurs mores (coutumes). La concession accordée par Frédéric Barberousse (1155-1190) aux communes de la Ligue lombarde, étendue de facto également aux communes non signataires de l’acte, de vivre selon leurs mores, au terme d’une lutte de plus de trente ans (Paix de Constance, 1183), a ouvert « officiellement l’ère des autonomies locales : symbolisées […] par les coutumes » (Cortese, 1995).
Au XIIIe-XIVe siècles, la science juridique a posé la question de savoir si les coutumes écrites pouvaient être assimilées aux statuts : les glossateurs et les commentateurs ont principalement souligné la distinction ontologique entre les deux sources, articulant leur discours sur l’interpretatio de la constitution de Constantin incluse dans le livre huit du Codex de Justinien (sous le titre Quae sit longa consuetudo), qui limitait l’efficacité de la coutume devant la loi (C.8.52(53).2). Même si elle est rédigée in scriptis, les juristes soutenaient que la coutume continuait à appartenir au droit non écrit. En résumé, on peut dire que la coutume écrite consolide les normes préexistantes, qui peuvent également naître de l’initiative privée des praticiens du droit, tandis que le statut est l’expression de la volonté législative de la commune. Une fois intégrées dans le recueil de statuts, les normes coutumières perdent leur nature juridique originelle : elles tirent leur efficacité de leur inclusion dans le livre officiel des statuts et, comme les autres dispositions, soumettent leur validité aux règles de révision et de mise à jour prévues par le statut (Garancini, 1985 ; Ascheri, 2003 ; sur la distinction « statut-coutume » dans le Midi français : Chastang, 2021).
Les statutari ont fait un usage intensif de cette mise par écrit des coutumes pour sélectionner les matériaux normatifs à incorporer dans le statut. Fatalement, avec l’absorption des normes coutumières dans les statuts, les rédactions des coutumiers sont tombées en désuétude, ce qui a eu des conséquences sur la tradition documentaire : de nombreux recueils ont été perdus après la publication des corpus de statuts. Le cas de Rome au milieu du XIVe siècle est exemplaire (Notari, 2014). Il est par conséquent impossible de dresser un tableau complet et diachronique des villes qui ont élaboré leurs propres coutumes. La documentation, même indirecte, est lacunaire et pas toujours facile à interpréter (pour une tentative appréciable, voir Besta, 1925). Nous nous contenterons de quelques exemples, utiles pour dégager certaines caractéristiques.
Commençons par Bologne. La compilation des coutumes au XIIe siècle « in curia Bulgari », c’est-à-dire dans la maison (qui était aussi l’étude, le tribunal et le lieu de réunion du conseil des consuls) de Bulgarus (c. 1110-c. 1166), célèbre juriste bolonais et élève d’Irnerius (fl. c. 1112-c. 1125), met en évidence des rapports encore mal définis dans la production des règlements du premier âge communal. Il n’est pas clair si la rédaction par écrit des coutumes eut lieu par initiative du gouvernement de la commune, ou bien par l’initiative de juristes privés. Cette rédaction primitive des coutumes de Bologne, perdue, est probablement postérieure à la mort du juriste (Bellomo, 1982 et 2013 ; Torelli, 1943).
À Venise, le doge Enrico Dandolo (la plus haute magistrature de la commune Veneciarum) a approuvé en 1195 le recueil de l’Usus Venetorum, aujourd’hui conservé dans un codex à la Biblioteca Marciana de Venise. La première partie du recueil énonce les règles de procédure à adopter par les tribunaux civils de la ville. La nature, coutumière ou statutaire, et la datation de ces règles ont fait l’objet d’un débat entre les historiens. Les études les plus récentes excluent que le recueil de règles sanctionné par le doge constitue le premier noyau du futur statut de la ville. Intitulé Parvum statutum, ce noyau primitif serait une adprobatio de coutumes mises par écrit vers le milieu du XIIe siècle (Besta, 1901 ; Pitzorno, 1913 ; Cessi, 1958 ; Gasparini, 2011).
Les coutumes d’Alessandria, ville lombarde (au sens médiéval du terme) nouvellement fondée en 1168, remontent à 1179. Composées de 22 chapitres, les coutumes d’Alessandria sont les plus anciennes qui nous soient parvenues. Le recueil n’est pas un simple constat du patrimoine existant de règles coutumières : en opérant une telle sélection et consolidation des normes, la nouvelle communauté d’habitants entendait mettre de l’ordre dans la variété des coutumes (d’origines diverses, romaine et lombarde, semble-t-il) observées dans les huit localités d’où était issue la nouvelle civitas. Les chapitres sont pour la plupart consacrés aux questions de droit de la famille, en particulier relatifs à la discipline du régime patrimonial et aux règles successorales. Bien que certains chapitres du registre contiennent des dispositions ayant clairement nature de préceptes, on ne peut cependant pas supposer que la jeune communauté alexandrine ait atteint la pleine iurisdictio ni, par conséquent, que ses règles s’appliquent pleinement sur l’ensemble du territoire. À ce stade, Alessandria n’aspirait pas davantage à une pleine reconnaissance de son autonomie de la part de l’empereur. Quelques années plus tard (1188), c’était justement lui qui approuve formellement les coutumes de 1179 en les inscrivant dans une relation d’intégration à la lex impériale (Viora, 1970 ; Pene Vidari, 1988 et 1992).
La mise par écrit des coutumes milanaises par un juge remonte également à la seconde moitié du XIIe siècle. Le peu de documentation dont nous disposons ne nous permet pas de savoir si la compilation des coutumes se faisait sur une initiative privée ou avec l’aide de la commune naissante de Milan. Ce recueil, dont il ne reste aucune trace, a été la source d’ou les compilateurs du célèbre Liber consuetudinum de Milan de 1216 ont tiré un important matériel réglementaire (Lattes, 1899). Malgré son nom, le Liber consuetudinum de 1216 est une compilation réglementaire qui exprime la pleine iurisdictio obtenue au début du XIIIe siècle par la commune sur la ville et son contado. En effet, le Liber présente les caractéristiques d’un vrai statut : publié à l’initiative du pouvoir urbain et rédigé par une commission représentative des différents groupes et factions élitaires de la ville, il réglemente les fonctions des magistrats de la ville, normalise et impose le droit établi et délibère ex novo sur l’ensemble du territoire en étendant la compétence de la juridiction communale aux relations féodales. L’analyse du texte révèle la présence importante de couches de règles spontanées provenant de la collection perdue du siècle précédent. Ainsi fusionnées dans le texte de 1216, les premières coutumes (usantiae) régissent des questions de droit de la famille et de l’héritage (selon une matrice lombarde), des coutumes féodales et des règles concernant des actions procédurales (en particulier civiles) qui ont toutes émergé de la pratique judiciaire (Storti, 2016).
Dans certains cas, l’intégration des coutumes écrites dans le texte du statut de la ville s’est produite à une période plus avancée de l’âge communal : à Rome, par exemple, les règles coutumières ont été intégrées dans le statut de la ville seulement après le milieu du XIVe siècle. Une source doctrinale, la Lectura super codice de Cinus de Pistoia (c. 1270-c. 1336), qui a occupé le rôle de juge du senateur (scil. podestà) de la commune entre 1310 et 1312, rapporte que des coutumes écrites étaient en vigueur apud Romanos au début du XIVe siècle. Celles-ci sont restées en vigueur parallèlement au statut communal de l’époque (un texte incomplet, ne réglementant que quelques matières, dont peu de fragments sont conservés) jusqu’en 1363. À cette date, à l’initiative du gouvernement du Popolus de Roma, le premier corpus complet de droit statutaire romain est entré en vigueur et les normes coutumières ont convergé (pour autant que l’on puisse le déduire d’une analyse stratigraphique complexe) dans le premier livre du De civilibus et extraiudicialibus (Schupfer, 1892 ; Notari, 2014 et 2023). La fluidité et le manque de formalisation des organes statutaires, qui caractérisent la tradition réglementaire du début de l’ère communale (Faini, 2013 et 2016), ont eu, dans certaines réalités, une extension temporelle différente et plus longue. La raison de la chronologie différente dans le développement institutionnel et donc dans la production de règlements dans les « Italies » communales fait l’objet d’un débat entre les historiens. Il est certain que les différences de développement économique, l’identité sociale des groupes gouvernant les villes et leur conception du pouvoir ont joué un rôle.
Arrêtons-nous sur Pise, où fut promulgué, dans la seconde moitié du XIIe siècle, l’un des règlements communaux les plus anciens et les plus remarquables d’Europe. Dans ce contexte, le processus de formation du statut communal a eu un résultat original. Nous l’aborderons à la fin de cet excursus pour le comparer aux expériences que nous venons d’évoquer. À Pise, les coutumes écrites ne se sont pas confondues avec la législation communale : en 1160 sont entrées en vigueur les célèbres Constituta, un ensemble réglementaire divisé en deux parties : la première, le Constitutum legis, recueillait les délibérations de l’assemblée communale ; la seconde, le Constitutum usus compilait les anciennes coutumes (Calasso, 1954 ; Cortese, 1995). La partition n’est pas si inhabituelle : dans plusieurs villes, la tradition coutumière ne s’est pas fondue dans le statut communal (pensons aux coutumes d’Alessandria mentionnées plus haut) ou s’est fondue sur une longue période, comme à Reggio Emilia (1265) ou à Rome (1363). La particularité du cas pisan réside dans la création de deux tribunaux, la curia legis et la curia usus, qui exercent leur juridiction sur les matières régies par les deux ensembles de règles (Storti, 1998 et 2001).
Brevia et premiers statuta
Passons maintenant aux deux autres éléments. Le breve est le serment que le consul (et, à une phase ultérieure, le podestat) ainsi que les autres principaux officiers de la commune prêtaient au moment de prendre leurs fonctions. Il était parfois également appelé sacramentum. D’un point de vue matériel, le breve se présente généralement comme un document indépendant, écrit sur parchemin à la première personne du singulier. Il était mis à la troisième personne lors de la transcription dans le recueil de statuts, mais il n’est pas rare qu’il ait conservé sa forme originelle. Le terme breve désigne également la compilation séparée des formules de serment, dans les cas où celles-ci restaient distinctes du recueil statutaire communal.
La formule du serment, prononcée publiquement par le magistrat, précisait les fonctions (que nous définissons de nos jours comme exécutives et juridictionnelles) que l’officier s’engageait à accomplir dans l’intérêt exclusif de la commune, tout en s’obligeant à respecter les règles de la collectivité et à préserver les droits des citoyens. Parfois, les brevia présentaient les orientations programmatiques des magistrats. Remontent au XIIe siècle les brevia de Gênes (1143), Pavie (les premiers aux années 1080 et 1085), Plaisance (1167, 1170-71, 1181-82), Pise (1162-1164) et Pistoia (1117 ?, 1140-1180) (Savelli, 2003 ; Faini, 2013 ; Tanzini, 2021).
Les formules des brevia, rédigées dès les tout premiers moments de la vie communale (XIIe siècle), révèlent le renforcement progressif de l’identité institutionnelle des communes urbaines. Ces formules devenaient de plus en plus complexes à mesure que la commune augmentait sa puissance et affinait sa production de normes écrites. Dès les débuts des communes les plus importantes, on peut identifier une multiplicité de brevia émanant de différents bureaux, qui étaient parfois en conflit les uns avec les autres (Besta, 1925).
Un bref aperçu des statuta. Les délibérations du conseil, comme l’affirmait Besta, constituaient la « pulpe » du statut, tandis que les autres éléments qui les rassemblaient en formaient le « squelette ». Au cours du premier âge communal, les noyaux normatifs apparaissent de manière désorganisée : la structure constituée par les brevia et les coutumes l’emporte sur la substance statutaire. Le terme statutum désigne alors souvent une seule délibération plutôt qu’un ensemble normatif élaboré. Les premiers noyaux de dispositions des statuta, qui commencent à se former entre la fin du XIe siècle et le début du XIIe siècle, apparaissent instables et desorganisés. Des études récentes ont mis en lumière une difficulté généralisée à unifier ces noyaux normatifs dans l’Italie septentrionale, ce qui remet en question le modèle de formation progressive et tripartite du statut (Faini, 2013). Au sein de cette phase de formation du statut, les normes promulguée par volonté des organes communaux (notamment les statuta) représentaient la composante la moins significative du complexe normatif communal en formation (sur la composante non volontariste du statut, voir Meccarelli, 2016).
Le statut communal. La source normative par excellence des communes italiennes médiévales
« En effet, chaque cité dans les territoires d’Italie établit ses propres statuts ou constitutions, par lesquels le podestat ou les consuls exercent les affaires publiques et punissent ceux qui transgressent, et ce, nonobstant toute loi qui semblerait aller à l’encontre de ce statut, parce qu’ils ont juré d’observer intégralement ces statuts ou constitutions » (Cedrus, 3.4)
Boncompagno da Signa (c. 1170 – post 1240), célèbre professeur de rhétorique dans diverses universités italiennes, dont celle de Bologne où il entra en contact avec de célèbres maîtres juristes, a laissé un précieux et précoce témoignage de l’Italie « statutaire » dans son Cedrus (1201). Au début du XIIIe siècle, les villes d’Italie (centrale et septentrionale), affirme Boncompagno, disposaient de statuts ou de constitutions en vertu desquels les magistrats (podestats ou consuls) exerçaient leurs pouvoirs juridictionnels. Les règles statutaires, ajoute-t-il, prévalaient dans la cité, même en présence de lois contraires (les leges impériales, peut-on supposer). Les statuts étaient donc observés dans les cités par dérogation au droit par excellence, le droit romain (§3.4). Boncompagno donne une définition du statut, en insistant sur l’obligation de respect de l’ensemble de la population résidente : « Le statut est un ensemble de mots rédigés sous forme écrite, dont le contenu concerne la manière dont doivent être régis, dans les affaires publiques et privées, ceux qui sont liés par le statut » (§3.3). Il note que les communautés rurales et autres formes corporatives de diverses natures élaboraient également leurs propres statuts (§3.5-6) (Boncompagno, 1201 ; Ascheri, 2006).
Le siècle des statuts vient de s’ouvrir en cette année 1201. Le témoignage de Boncompagno montre qu’après une première formation désordonnée au XIIe siècle, on assiste à une grande prolifération de statuts unitaires complexes, qui se poursuit au siècle suivant.
L’écho de la guerre contre l’Empire est encore fort en Italie du Nord et surtout en Lombardie. L’issue heureuse de la guerre et la Paix de Constance qui s’ensuivit en 1183 avaient renforcé les communes, autorisées par des clauses de privilège à vivre selon leurs propres coutumes et lois. Toutefois, comme on le sait, la question de l’interprétation de cet accord par chacune des parties restait ouverte : pour les communes, il s’agissait d’une autorisation généralisée de promulguer des lois, pour l’empereur, d’une concession aux seules communes de la Ligue et sujette à révocation. Nous y reviendrons.
Il est inconcevable de dresser une liste des villes qui ont approuvé leurs propres statuts participant activement à cette formidable floraison. En 1925, l’historien du droit Enrico Besta tente une systématisation par zones régionales des statuts (Besta, 1925). Avec une méthode qui peut aujourd’hui susciter une certaine perplexité, mais avec une capacité d’appréhension des dossiers et des matériaux qui suscite toujours l’admiration, l’érudit a passé en revue, en plus de cent pages, les statuts du Piémont, de la Lombardie, de la Vénétie, de la Ligurie, de l’Émilie, de la Garfagnana et de la Lunigiana, de la Romagne, de la Toscane, des Marches, de la Toscane romaine (territoires de l’Ombrie et du haut Latium), de l’Ombrie, du Ducato romano (correspondant à une partie de l’actuel Latium), et enfin ceux d’Italie méridionale et des îles. Pour chaque zone géographique, l’érudit indique, en les subdivisant en sous-zones, tous les statuts locaux connus, avec leur dates de promulgation et de réformes éventuelles.
Nous nous limitons à rendre compte de quelques caractéristiques générales et communes à la plupart des statuts de ces villes. Du point de vue de la structure des textes, on constate, à partir du milieu du XIIIe siècle, une tendance générale des communes à réorganiser rationnellement leurs statuts, formés (comme nous l’avons vu) par la juxtaposition de brevia, de coutumes et d’autres matériaux réglementaires, et se développant sous une forme alluvionnaire. Les communes ont pensé à les subdiviser en sections par affinité de matière. Celles-ci prennent localement des noms divers : dans la plupart des cas, la division se fait par libri, mais il existe des noms savants tels que collationes (Bergame), tractatus (Florence), distinctiones (dans le Siennois, peut-être par émulation du Decretum de Gratien, suggère Besta), pour s’en tenir aux principales variantes.
Le nombre de livres et de critères de subdivision des sujets varient également. La seule constante est la présence fixe d’un livre consacré à l’organisation communale, qui était la partie du statut la plus sujette à des changements en raison de bouleversements politiques internes et répétés. La subdivision canonique (peut-être empruntée au Liber extra (1234) de Grégoire IX, suggère Lorenzo Tanzini) prévoit une division en cinq livres : L. I, de regimine, l’organisation communale réglementée ; L. II, de civilibus, les règles du procès civil et normes du droit civil substantiel ; L. III, de maleficiis, le droit pénal et le procès ; L. IV, damnorum datorum, le procès pour les dommages donnés et enfin, le livre V, extraordinariorum, qui contenait des chapitres sans rapport avec les sections précédentes, comme des dispositions relatives à l’administration de la cité (règles d’hygiène publique et gestion des communs), ou des chapitres ajoutés ultérieurement. La réglementation des dommages et intérêts est une particularité du statut urbain et des statuts ruraux : elle présente des profils procéduraux spécifiques pour protéger les sujets, généralement des agriculteurs, endommagés par des animaux et des personnes (Dani, 2006).
D’abord incluses de manière alluviale dans le recueil des statuts, les dispositions trouvent un ordre à l’occasion de leur compilation au XIIIe siècle, généralement assurée par des doctores. Dans cette forme nouvelle, le statut se présente comme un système de normes contenant des références internes, une distinction entre normes réformables et non réformables, des règles d’intégration avec les ordres universels pour combler les lacunes, des règles de coordination avec d’autres acteurs socio-économiques de la ville (statuts des arts, par exemple) et des index de rubriques.
Les statuts étaient rédigés en latin. Leur rédaction ultérieure en langue vernaculaire n’a pas été généralisée et a eu lieu à différentes époques. La Toscane, à cet égard, représente un cas significatif avec le Costituto siennois de 1309-1310, un monument de législation médiévale en langue vernaculaire, et avec le Statut florentin de 1355 (Ascheri 2002 ; Salvestrini-Tanzini, 2015 ; Bambi, 2014 et 2023).
La « doctrine des statuts » et la potestas statuendi des communes
Par l’expression « doctrine des statuts » (dottrina degli statuti), l’historiographie juridique désigne la réflexion théorique menée par les professeurs de droit sur la validité des statuts communaux. En d’autres termes, elle cherche à revenir sur la manière dont les juristes médiévaux s’interrogent sur la légitimité du pouvoir réglementaire des villes (la potestas statuendi).
Comme nous l’avons souligné dans les pages précédentes, parallèlement à l’essor du monde communal, les XIIIe et XIVe siècles ont vu une grande floraison de statuts. Les juristes qui enseignent à l’université ont assisté à l’essor de ces nouvelles sources territoriales du droit mais, au moins dans un premier temps, ils n’ont pas jugé nécessaire d’inclure ce phénomène spontané dans le système des sources juridiques romaines.
Pour tenter de comprendre cette attitude, il est nécessaire de se replacer dans le contexte politique et juridique dans lequel évoluent les maîtres juristes des XIIIe et XIVe siècles. Schématiquement et en résumé, nous pouvons dire que l’école des glossateurs de Bologne, fondée par Irnerius au début du XIIe siècle, après avoir redécouvert les livres de Justinien et refondé les études romanistes (XIe s.), a imposé à l’attention générale la thèse (ou peut-être la fictio) de la continuité entre les empires romain et médiéval : selon les glossateurs, l’empereur germanique était le successeur des empereurs romains.
Irnerius adhère à l’idée, qui circule dans les milieux impériaux, selon laquelle avec l’approbation à l’époque impériale de la Lex regia de imperio (dont le Digeste avait transmis certaines informations) le peuple romain avait définitivement transféré à l’empereur tous ses pouvoirs originels, y compris le pouvoir réglementaire. Il s’ensuit que les Libri legales de Justinien doivent être considérés comme la seule source de législation et l’empereur, autorité suprême du monde, comme le seul détenteur du pouvoir de légiférer. Une glose attribuée à Irnerius, qui oppose les droits du prince à ceux du peuple, répète que le peuple a perdu le pouvoir de promulguer des lois abrogeant le droit impérial. La glose d’Irnerius, ou peut-être de son élève Iacobus (D.1.3.32) est transcrite dans Cortese, II, 1964. La lex regia, qui a alimenté d’interminables discussions doctrinales, est mentionnée dans la constitution Deo Auctore, C.1.17.7.
Les glossateurs de la première génération ont soutenu que la potestas statuendi des communes n’avait pas de fondement dans le Corpus Iuris Civilis puisqu’il renfermait, à leurs yeux, l’ensemble de l’univers juridique. Compte tenu de ces hypothèses, il n’était pas possible d’attribuer une légitimité à la source statutaire. Certains de ces maîtres ne cachaient pas dans leurs cours une certaine susceptibilité à l’égard d’une source de droit non réfléchie, émanant d’assemblées délibérantes locales, confiée à des statutari praticiens et non sapientes du droit. Le ius novum statutaire ne pouvait en aucun cas être comparé aux subtilités du droit civil romain.
Les attitudes ont changé avec l’extension à grande échelle du phénomène urbain et les tribunaux locaux recourent de façon croissante à cette source pour régler les litiges. Les glossateurs du milieu du XIIIe siècle et les commentateurs ultérieurs sont très attentifs à leur environnement. Tout en conservant un respect total pour le contenu des lois du Corpus Iuris Civilis, ils ne se sont pas contentés de rappeler passivement le texte : ils l’ont étudié de manière critique afin d’adapter ses règles et ses principes, par des procédures logiques, aux phénomènes émergents de la société et des institutions. En d’autres termes, ils ont créé de nouvelles normes à partir du droit romain, en élargissant ou en restreignant leur champ d’application, selon le cas. Cette activité herméneutique et normative est connue sous le nom d’interpretatio (pour un résumé efficace voir Chiodi, 2012).
Le débat théorique des écoles de droit italiennes sur la structure des sources dans le pluralisme médiéval, sujet d’intérêt spécifique ici, a commencé dès la deuxième génération de glossateurs, au début du XIIe siècle. La réalité concrète de la multiplication des coutumes (qui, comme nous l’avons vu, étaient de plus en plus écrites, ouvrant la voie à la promulgation de statuts) posait le problème de leur relation avec la lex.
Contrairement à l’opinion restrictive du chef de l’école Irnerius, certains glossateurs (certainement pas tous, comme le souligne Cortese, 1964) ont cherché la voie d’une réconciliation entre les principes déduits des leges de Justinien et la réalité communale émergente et dynamique. En particulier, Iohannes Bassianus (fl. 1150-1200) (à partir d’une intuition du maître Bulgarus et d’un fragment oublié de Salvius Julianus) reconnaissait la légitimité des coutumes : les coutumes générales, affirmait-il, pouvaient annuler la lex romana ; les coutumes spéciales ou communales (alicuius municipii) pouvaient seulement y déroger, sans entraîner l’abrogation de la règle, à condition que le peuple ait certa scientia, c’est-à-dire la pleine conscience des effets provoqués par l’introduction de la nouvelle coutume (Cortese, 1964). La théorie a également été largement diffusée en dehors de l’Italie, son influence « en matière de coutume a été énorme » (Gouron, 1988). Elle a ouvert la voie à la relation entre les droits particuliers (iura propria) et les droits universels (ius commune), une relation fondée sur le lien de dérogation qui a caractérisé l’expérience juridique médiévale.
Ces réflexions hétérodoxes ont influencé le débat doctrinal ultérieur sur la potestas statuendi (ou potestas condendi statuta) communale. A partir du milieu du XIIIe siècle, les juristes élaborent diverses théories pour justifier le pouvoir législatif des communes, dans le but de conférer une légitimité aux complexes réglementaires que les communes promulguent depuis un certain temps : « il s’agissait de trouver, éventuellement dans le Corpus Iuris Civilis, le fondement d’une autonomie qui, pour les communes, était en fait pleinement réalisée » (Storti, 1991).
Plusieurs théories ont été formulées sur ce point. Le débat s’est principalement concentré sur trois élaborations principales : la théorie de la permissio (ou pouvoir dérivé), la théorie de la iurisdictio et la théorie du regimen. La doctrine des statuts est un thème qui a toujours suscité de l’intérêt dans l’historiographie du droit médiéval et sur lequel les chercheurs ont échangé des opinions différentes (nous rappelons un certain nombre de contributions, également sous forme de manuels, qui se sont attardées sur le thème depuis la seconde moitié du XXe siècle : Sbriccoli, 1969 ; Calasso, 1954 ; Bellomo, 1982 ; Caravale, 1984 ; Storti, 1991).
Il convient de préciser que les théories rappelées aujourd’hui n’ont pas observé une succession temporelle (comme le souligne Sbriccoli, 1969), mais qu’elles ont circulé en parallèle. En particulier, la permissio n’a pas été écartée, même après l’adoption générale de la théorie de la iurisdictio par Bartolus de Saxoferrato (1313/14-1357) au milieu du XIVe siècle.
En voici une brève illustration. La théorie de la permissio parvient à justifier la potestas condendi communale à partir de prémisses pro-impériales. Elle reconnaît à la commune le droit de légiférer pour ses citoyens, de « facere leges que ligarent tantum cives suos » comme le dit le glossateur Odofredus (m. 1265). Mais cette capacité doit se réaliser dans le cadre de l’ordre hiérarchique impérial qui attribue au prince un pouvoir réglementaire exclusif. Les partisans de la théorie de la permissio notent que l’empereur délègue ses fonctions à divers sujets : il confie par exemple des pouvoirs juridictionnels à ses fonctionnaires. De même, l’empereur peut accorder aux communes le pouvoir de promulguer des lois (la permissio). La potestas statuendi découlait donc de cette volonté impériale.
D’autre part, les juristes de l’apogée du XIIIe siècle ont constaté que depuis la Paix de Constance (outre les interprétations plus ou moins larges données au fameux « privilège », mentionné ci-dessus), l’empereur permettait aux communes de la Ligue de se gouverner selon leurs propres coutumes (§1, « consuetudines vestras »). Mais ce n’est pas tout : dans le même privilège, l’empereur, se réservant la juridiction d’appel, exigeait des juges délégués qu’ils règlent les litiges locaux en appliquant les lois et les coutumes de la cité (§10, « secundum leges et mores ipsius civitatis ») (Storti, 1991, avec référence à l’édition critique du texte pour ce passage se référant expressément aux leges).
Albertus Gandinus (c. 1245-c. 1310), célèbre juge expert en droit statutaire et l’un des partisans les plus convaincus de la thèse de la permissio, a étroitement lié la potestas statuendi des communes lombardes aux clauses de la Paix de Constance (« Lombardi habent ex spetiali privilegio concesso in Pace Constantiae quod unaquaeque civitas possit sibi facere statuta », dans ses Quaestiones statutorum, 1299 ; Sbriccoli, 1969). Il est évident que fonder la potestas statuendi sur le consentement de l’empereur exposait l’autonomie communale à des dangers, notamment celui de la révocation : ce risque, redouté par certains, s’est concrétisé en 1226 lorsque Frédéric II a révoqué la Paix de Constance, interdisant aux communes de promulguer des statuts (sans toutefois gagner beaucoup d’avantages dans la nouvelle lutte contre les communes) (Sbriccoli, 1969 ; Cortese, 1995).
La théorie de la permissio a continué à être rappelée au cours du XIVe siècle, par exemple par Rainerius de Forlivio (m. 1358), le maître de Bartole, qui a continué à placer la permissio comme base de la potestas, même après l’élaboration complète de la théorie de la iurisdictio par son élève des Marches, avec lequel il a marqué sa distance en la matière (Martino, 1984).
Bartole, le plus grand interprète de l’école des commentateurs, a formulé la théorie de la iurisdictio en 1343, lui assurant une grande notoriété. L’objectif immédiat de Bartole, juriste immergé dans la vie communale, était de fournir des bases théoriques plus solides à la potestas statuendi, de façon à la soustraire de la subordination impériale. La perspective de Bartole était très ambitieuse. Il place la potestas statuendi dans un horizon conceptuel plus large que le simple acte de consentement du prince, et sa théorie étudie la nature même des ordres juridiques, des plus grands aux plus petits. Partant de la notion d’imperium, c’est-à-dire le caractère absolu du pouvoir de l’empereur (iurisdictio plena), Bartole affirme qu’à plus petite échelle, même les villes qui ne reconnaissent aucun supérieur jouissent d’une pleine iurisdictio. Cette notion ainsi formulée coïncide avec celle d’autonomie (mais diffère de celle d’indépendance). Le statut trouve son fondement dans l’étendue de cette iurisdictio de la commune, terme qui (comme nous l’avons vu) résumait au Moyen Âge l’ensemble des pouvoirs détenus par un ordre juridique : gouvernement, justice et pouvoir réglementaire (Calasso, 1954 ; Sbriccoli, 1969 ; Storti, 1991).
Bartole élabore la théorie de la iurisdictio sur la base du fragment de la lex omnes populi de Gaius (D.1.1.9), selon lequel « tous les peuples qui se gouvernent par des lois (leges) et des coutumes (mores), utilisent en partie une loi qui leur est propre, en partie une loi commune à tous les hommes (« Omnes populi qui legibus et moribus reguntur, partim suo proprio, partim communi omnium hominum iure utuntur »).
Dans la célèbre repetitio alla lex omnes populi (Pérouse, 1343, que nous citons dans de brefs extraits traduits), Bartole observe que « chaque peuple ayant juridiction est autorisé à promulguer un ius proprium », ajoutant que « lorsque le peuple a pleine juridiction, il peut faire ses propres statuts, sans attendre l’autorisation de l’autorité supérieure ».
Pour reprendre les termes d’Ennio Cortese, « l’indifférence » avec laquelle les premiers glossateurs, considérant ce fragment comme peu significatif, ont sous-estimé la possibilité de le référer « au problème de la coexistence des systèmes réglementaires locaux et romains » est « frappante » (Cortese, 2005 et 2006).
La troisième théorie, celle du regimen, est due à la plume et à l’esprit de Baldus de Ubaldis-Balde (c. 1327-1400), élève de Bartole. Balde a lui aussi commencé ses réflexions sur la potestas statuendi à partir de la lecture du fragment de la lex omnes populi. Il en a tiré des conclusions différentes, placées à un autre niveau de raisonnement, confirmant ainsi son autonomie intellectuelle par rapport à Bartole. La théorie de la iurisdictio ne le convainc pas, à la fois parce qu’elle ne garantit l’autonomie normative qu’aux ordres juridiques territoriaux dotés d’une pleine iurisdictio, et parce que le fondement de la légitimité des statuts continue à graviter autour du pouvoir du prince.
Balde a cherché ailleurs le fondement de la légitimité des communes à légiférer, en trouvant ce pouvoir dans le ius gentium, le système juridique fondé sur la raison naturelle, commun aux peuples et non soumis aux règles du ius civile. « Populi sunt de iure gentium », affirmait-il : ils ne descendent donc de personne et n’ont pas été créés par qui que ce soit. Avec un « syllogisme sublime » (comme l’a noté Francesco Calasso), Balde affirme que le populus (toute agrégation humaine, donc aussi la cité) qui a spontanément créé sa propre organisation doit seulement chercher en lui-même le fondement de son organisation (regimen), généré par un besoin naturel. Puisqu’il est impensable, poursuit Balde, qu’une organisation vive sans règles (« sine legibus et statutis »), la justification de ces règles devrait être recherchée dans l’existence même du regimen, à l’instar de tout être vivant qui se gouverne lui-même avec son esprit et son âme. Il n’est donc pas nécessaire de chercher ailleurs que dans l’organisation communale la légitimité de promulguer des statuts. Par conséquent, poursuit Balde, tous les peuples peuvent se doter de statuts et lorsque les statuts cessent d’exister, c’est le ius civile qui s’applique. Malgré la hauteur spéculative atteinte, amplement soulignée par Calasso dans son célèbre manuel d’histoire du droit, la théorie de Balde n’a pas eu le succès escompté auprès de ses contemporains.
Les propos de Balde sur le rapport entre le statut et le ius civile nous permettent de passer facilement à un dernier thème. Au XIVe siècle avancé, époque à laquelle vivait le juriste ombrien, le droit écrit s’était depuis longtemps imposé comme la principale source juridique de la cité. Les historiens ont souvent eu recours à la métaphore efficace du miroir pour souligner que le statut était une sorte de reflet de la vie économique, sociale et politique de la commune. Cependant, il faut considérer que le statut ne contenait pas toutes les règles par lesquelles la ville régissait sa vie. Le système juridique communal ne s’arrêtait pas à la législation locale, qu’elle soit statutaire ou coutumière. D’autres droits coexistent sur le territoire communal, à l’image de cette intégration entre les sources du droit particulier (ius proprium, iura propria) et les sources de l’ordre universel qui caractérise le long âge du ius commune (XIIIe-XVIIIe siècles). D’autres ordres juridiques territoriaux, tels que les statuts des villes dominant des communautés assujetties, étaient appelés à compléter les lacunes du statut devant les tribunaux. En dernier recours, le droit commun, le droit civil et le droit canonique étaient utilisés pour certaines questions. Dans ce « système » brièvement décrit, la règle indéfectible était que le juge, en réglant le litige qui lui était soumis, appliquait d’abord au cas concret la règle contenue dans le statut communal, si elle était exprimée.
Le statut prescrivait ensuite au juge les sources à appliquer, selon une graduation précise introduite par la formule « dans les cas où le statut ne prévoit pas, qu’il soit observé » (« in casibus in quibus statuta non disponant, observetur ») ou « en l’absence de statut » (« deficientibus statutis »). Ces formules et ces graduations des sources présentaient de nombreuses variations locales : généralement, l’ordre d’application présentait la loi en premier lieu, puis la coutume, et enfin le droit commun, indiqué dans diverses formules (« leges et iura », « leges romanas », « iura civilia »). Dans les communes des Marches, province de l’État ecclésiastique, où les Constitutions du Card. Albornoz (1357) étaient en vigueur, la hiérarchie des sources de droit place les iura civilia en dernière position, précédées par le droit canonique. À Rome, ville du pape, dans le statut de 1363, les iura civilia précèdent les iura canonica. À Pise, peut-être par méfiance envers l’interpretatio des maîtres-juristes, le juge, en cas de lacune entre le Constitutum legis (1233) et la coutume, devait juger selon la justice. En effet, il faut considérer que la référence au ius commune entraînait également la référence à la doctrine romaniste, qui tendait à adapter le droit statutaire à ses propres catégories herméneutiques. Il s’agit d’un thème qui dépasse le cadre de ces pages, mais qu’il est essentiel de garder à l’esprit, étant donné que de « l’effort de la doctrine pour comprendre la norme statutaire dans le cadre de la scientia civilis [a été] le motif central de l’histoire juridique du Moyen Âge » (Quaglioni, 1991).
Il convient d’attirer l’attention sur un dernier aspect, qui concerne le rapport entre les sources du droit. Nous avons brièvement évoqué le thème de la dérogation en nous référant à un passage du Cedrus de Boncompagno. Les normes du statut communal, source par excellence du ius proprium, ne sont pas abstraites du système de droit commun : sur le territoire communal, statut et droit commun sont coexistents. Les règles du statut, selon Boncompagno, sont observées même lorsqu’elles sont en conflit avec la loi.
Il convient donc d’être prudent lorsqu’on affirme que la loi est incomplète et qu’elle présente des lacunes dans certains domaines, notamment en matière de droit civil. La règle générale est que la loi contient des préceptes qui entrent en conflit avec le droit romain ou qui ne sont pas prévus par celui-ci. Le ius proprium et le ius commune sont en effet unis par le pouvoir du statut de déroger aux normes générales du droit romain et canonique. L’historien du droit Severino Caprioli a donné à ce système le nom de « nesso di deroga » : les règles du statut ont le pouvoir de ne plus appliquer les règles pérennes du ius commune en vigueur sur le territoire communal, sans toutefois les abroger (Caprioli, 1992 ; Treggiari, 2017). À l’inverse, si certains profils sont prévus par le droit romain ou sont déjà réglementés par la coutume, il n’y a pas d’obligation de les inclure dans la loi. Ainsi, le pluralisme des sources a été résolu localement, avec une intégration mutuelle.
Conclusion
L’ironie piquante avec laquelle Dante stigmatise dans son Purgatoire la mutabilité des mesures législatives incluses dans les statuts florentins (les deux célèbres tercets se lisent dans l’exergue du chapitre) reproduit un stéréotype également répandu dans d’autres réalités communales de la péninsule. La variabilité des normes statutaires et leur perte soudaine d’efficacité (due à la fois à la succession rapide des mesures et au recours à des pratiques dérogatoires) sont réduites à une devise, à un proverbe (« legge vicentina dura dalla sera alla mattina »).
Dans la critique du poète (qui se positionne en tant que polémiste politique) à l’égard de la législation communale, on peut discerner une matrice érudite et, au sens large, aristocratique : c’était la critique de ceux qui comparaient la variabilité du système normatif communal avec l’uniformité et la stabilité, acquises depuis plus de deux siècles, des livres législatifs justiniens après la renovatio irneriana (Conte, 2009). Dans la critique de la variabilité transparaît le mépris pour la législation communale, qui constitue en soi un topos de longue durée, dont la diffusion fut favorisée par les plumes du XIIIe siècle de certains maîtres-juristes.
Les statuts communaux, non directement rattachables aux sources et aux structures conceptuelles de la tradition romaniste, étaient considérés comme une source de rang inférieur. Nous l’avons constaté. Cependant, la variabilité décriée était, en réalité, la caractéristique propre du statut communal, un texte normatif vivant et ouvert (Tanzini, 2021). La validité des chapitres statutaires était dans certaines réalités programmatiquement limitée à une période précise (un an à Pérouse : Caprioli, 1988), tout en restant toujours susceptibles d’être réformés par l’assemblée compétente pour la fonction normative.
La législation communale est, par nature, inapte aux formes de stabilisation : lorsqu’on trouve des copies tardives de statuts communaux, rédigées à l’époque de leur vigueur – c’est-à-dire avant le XVIIIe siècle, comme mentionné –, où sont reproduites même calligraphiquement des normes fixes et cristallisées, on fait alors face non plus à un statut communal, à une source normative vivante, mais bien un de ses simulacres.
Grandes collections des statuts communaux italiens et ressources en ligne
Les statuts médiévaux et du début de l’époque moderne qui ont survécu sont généralement conservés dans les archives des héritiers de ceux des autorités communales médiévales. Lorsque des États territoriaux ont vu le jour, les gouvernements centraux ont rassemblé les statuts communaux pour les mettre à la disposition des organes juridictionnels. Dans ce dernier cas, les statuts se trouvent généralement dans les archives d’État des capitales des anciens États. Les statuts seigneuriaux se trouvent dans les archives privées des familles aristocratiques et des institutions ecclésiastiques qui exerçaient leur domination territoriale sur les communautés sujettes.
Il existe en Italie deux grandes collections de statuts communaux qui appartiennent à deux prestigieuses institutions culturelles publiques, toutes deux situées à Rome : la Biblioteca del Senato della Repubblica et les Archives d’État (Archivio di Stato). Une troisième collection importante se trouve à l’étranger, à l’Université de Yale à New Haven, aux États-Unis.
La plus importante collection de statuts communaux (mais aussi de statuts d’organes et d’associations non territoriales et plus généralement de sources réglementaires locales) est conservée par la Biblioteca del Senato. La Raccolta degli statuti se compose environ de 800 manuscrits allant du XIIIe au XIXe siècles, de 40 incunables et de 4200 éditions imprimées. L’acquisition de documents individuels et de collections entières de bibliothèques appartenant à des universitaires a commencé en 1870 et se poursuit encore aujourd’hui.
En 1943, à l’initiative bienvenue du bibliothécaire Corrado Chelazzi, la Biblioteca del Senato a commencé à publier un catalogue des documents de sa collection. Ils ont été classés par ordre alphabétique de localisation. Le catalogue se compose de milliers de fiches analytiques des manuscrits originaux et d’éditions imprimées des statuts. Les fiches fournissent des informations détaillées sur les éléments externes et internes (c’est-à-dire liés au contenu) de chaque pièce. Il s’agit d’un travail impressionnant, un outil de référence précieux qui a été affiné au fil du temps et qui est très apprécié des spécialistes. Après une longue interruption, l’entreprise d’édition des statuts a repris de la vigueur depuis les années 1990 grâce aux efforts du directeur de la bibliothèque Sandro Bulgarelli (Casamassima, 2001, 2015 et 2019 ; Bulgarelli, 2001). Les volumes les plus récents (VII-X) sont enrichis par les introductions de quelques-uns des plus grands spécialistes italiens sur le sujet (Ascheri, 1990 ; Pene Vidari, 1999 ; Storti, 2021 ; Ortalli, 2024). La publication du onzième et dernier volume et des index est prévue prochainement. Ce catalogue (Catalogo della raccolta di statuti, consuetudini, leggi, decreti, ordini e privilegi dei comuni, delle associazioni e degli enti locali italiani dal Medioevo alla fine del secolo XVIII, volumi I-X, 1943-2024 communément appelé le « Chelazzi ») et ces fiches de mise à jour peuvent être consultés en ligne. La Biblioteca del Senato a également sélectionné et numérisé les statuts considérés comme les plus précieux de son fonds et les plus pertinents pour les études historiques. La numérisation complète des exemplaires sélectionnés peut être consultée en ligne.
La deuxième collection précieuse et remarquable de statuts communaux italiens est conservée par les Archives d’État à Rome. Le fonds Collezione Statuti provient en grande partie du ministère de l’Intérieur de l’État pontifical. Il a été déposé dans les jeunes archives italiennes après 1870, lorsque l’État pontifical s’est éteint à la suite de l’occupation militaire de Rome par l’Italie (Ficola, 2006). Aujourd’hui conservé à la Biblioteca dell’Istituto di Corso Rinascimento, ce fonds comprend près de 1800 documents statutaires italiens et, dans une moindre mesure, étrangers, dont les deux tiers environ proviennent des communautés de l’ancien État ecclésiastique, c’est-à-dire des territoires correspondant aux actuelles régions du Latium, de l’Ombrie, des Marches, de la Romagne et d’une partie de l’Émilie. Comme pour le Sénat, la collection comprend, outre les statuts communaux et seigneuriaux, des textes réglementaires appartenant à des organismes non territoriaux.
Le premier noyau de la collection s’est constitué à la fin du XVIIIe siècle à l’initiative de la Sacra Congregazione del Buon Governo, un service central de l’État ecclésiastique, basé à Rome, qui supervisait l’administration des communautés locales et exerçait des fonctions juridictionnelles. De retour à Rome après un bref séjour à Paris pendant l’ère napoléonienne, cette collection rare a été placée après 1850 dans le nouveau ministère de l’Intérieur, dirigé pendant quelques années par Teodolfo Mertel, juriste, historien et futur cardinal. Grâce à l’initiative de Mertel, qui était déterminé à rassembler le plus grand nombre de statuts de manière organique au sein du ministère, la collection s’est considérablement enrichie de copies et d’originaux envoyés par toutes les communautés de l’État qui ont répondu à une lettre circulaire de 1856. Dans cette missive, le ministre de Rome demandait aux communes de l’État pontifical de lui envoyer une copie de leurs statuts. La reconnaissance d’une telle législation dispersée n’est pas motivée, comme on pourrait l’imaginer, par de simples intentions administratives ou érudites, mais par un projet politique et culturel précis de Mertel visant à démontrer que le « sacro deposito » des sources des communes italiennes contenait in nuce les principes de base de la modernité juridique. Le projet de Mertel prévoyait la publication intégrale des statuts pontificaux, ce qui n’a jamais été réalisé (Notari, 2023). Mertel était également responsable du travail de systématisation des statuts collectés. Son travail constitue encore aujourd’hui la base du catalogue des statuts. Le catalogue de la collection est disponible en ligne.
La plus riche collection de statuts communaux italiens hors d’Italie est conservée à New Haven (État-Unis) dans la Rare Book Collection de la Lillian Goldman Law Library de la Yale Law School. La plus grande partie de la collection, l’Italian Statute Collection provient d’un achat massif effectué en 1946 par cette bibliothèque sur le marché des antiquités à Rome. La remarquable collection privée achetée, qui appartenait à un juriste érudit dont l’identité n’est pas précisée, comprenait près de 900 pièces, dont 52 manuscrits des XIVe-XVIIIe siècles, 9 incunables et de nombreux livres du XVIe siècle. Certains statuts conservés à Yale sont totalement inconnus des bibliographies de statuts italiens, comme par exemple le statut de Montebuono, 1437 (Notari, 2011 ; Widener, 2011). La collection de statuts italiens s’est depuis largement enrichie. Pour une vue d’ensemble de la collection de statuts, à laquelle Mike Widener, bibliothécaire pendant une longue période en charge du fonds à la Bibliothèque de la faculté de droit de Yale, a consacré un effort fructueux, voir en ligne. Le catalogue de la collection des statuts manuscrits italiens, publié en 2016, est également accessible en ligne. Le catalogue de l’exposition The Flowering of Civil Law : Early Italian Statutes in the Yale Law Library, consacrée aux statuts et qui s’est tenue entre 2008 et 2009, est aussi accessible en ligne (Widener, 2024). La bibliothèque de Yale a numérisé certains manuscrits, qui peuvent être consultés en ligne.
POUR FAIRE LE POINT
- Ce chapitre indique que la recherche de l’unité et de la pacification interne font partie des éléments constitutifs de la commune médiévale. Dans cette quête, quel rôle a joué la rédaction des textes juridiques, et en particulier des statuts de la ville ?
- Les statuts communaux ont été élaborés au terme de longs processus, par assemblage de divers matériaux réglementaires. Outre les résolutions adoptées par les assemblées (les statuts au sens strict), quels sont les autres éléments qui composent le statut ? Et d’où proviennent-ils ?
- Les juristes des XIIIe et XIVe siècles ont développé des théories pour justifier le pouvoir législatif des communes. La première à s’affirmer est la théorie de la permissio. En quoi consiste cette théorie et en quoi peut-elle être qualifiée de « pro-impériale » ?
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