Le droit canonique dans le ius commune. Summae et commentaria
La critique des genres littéraires : écrits de forme et écrits d’usage
Dans la seconde moitié du XIIe siècle, coïncidant avec la phase finale de la rédaction du Decretum de Gratianus-Gratien, un riche apparat exégétique se développe autour du texte normatif recueilli par le magister. Des écrits interprétatifs prennent des formes différentes et répondent à des besoins de plus en plus variés.
Il serait improductif et méthodologiquement incorrect de définir et de classer ces types d’écrits interprétatifs dans les genres littéraires « typiques » qui ont inspiré les besoins definitionnels de l’historiographie la plus ancienne, sur la lancée cataloguante et schématisante d’une philologie classique, depuis longtemps dépassée. La raison principale insiste sur le fait que ces écrits interprétatifs sont liés à l’enseignement, ce sont des textes écrits dans les écoles et pour les écoles, qui sont nées en même temps que la diffusion du Decretum Gratiani à Bologne et ont fleuri dans toute l’Europe de l’époque. À l’instar de ce qui se passait à la même époque dans les écoles qui travaillent autour de la compilation du droit romain de Justinien, dans ce contexte vivant et animé, des hommes qui ne maîtrisaient pas encore ou pas complètement des connaissances juridiques raffinées et approfondies, commencent à définir les sphères d’autonomie du droit canonique, tentent de comprendre et de commenter le contenu des canons du Decretum, et de les confronter à la réalité de l’époque.
Une fois face aux normes, considérées comme un texte écrit, forme d’écriture par excellence sur laquelle se fonde la nouvelle science juridique, pour les premiers juristes la seule autre forme d’écriture admissible est celle qui clarifie pour le lecteur ou l’auditeur le contenu de ces normes (Caprioli, 1978). Aux écrits in forma représentés par les normes, s’ajoutent et se superposent des écrits interprétatifs aux caractéristiques variables qui reflètent le travail quotidien d’interprétation et de révision, la vivacité des écoles et l’évolution continue de la pensée juridique médiévale. Le caractère multiforme de l’interpretatio se reflète dans les écrits exégétiques définis avec efficacité par Stephan Kuttner, textes vivants ou sine forma (Kuttner, 1958 ; Stickler, 1958).
L’analyse de la formation et de la circulation de ces textes, fruit et patrimoine commun des écoles, permet de comprendre la dimension communautaire de la science juridique qui transmet aux textes de l’interpretatio le signe visible de la maturation continue de l’exégèse des maîtres du droit et de leur vitalité persistante auprès des étudiants (Speciale, 1994). Classer ces écrits dans un genre littéraire spécifique revient à altérer leur nature même, car ces « écrits d’usage » représentent la variété de la pensée formulée et communiquée oralement et ensuite annotée au texte, à l’écriture in forma (Bellomo, 1997).
Certains contenus ne sont pas originaux, des passages entiers sont copiés d’autres textes ; il est souvent impossible d’attribuer leur paternité à un seul maître, et ils échappent au concept moderne de propriété intellectuelle (Caprioli, 1978 ; Stickler, 1981). Mais le travail même de sélection des textes à utiliser et à copier implique en soi un choix visant la pensée que l’on veut soutenir ou l’idée que l’on veut critiquer. Il fait toute l’originalité de l’œuvre. Ce travail de construction interprétative ne se fait pas dans la dimension solitaire et isolée du sage. Il est le fruit d’une rencontre entre des maîtres et des étudiants qui se trouvent face à des sources à interpréter et des doutes à résoudre.
L’exégèse, projection du processus d’autonomisation du droit canonique
À partir du moment où le Decretum de Gratien est introduit dans les écoles, l’exégèse des sacri canones et des decreta sanctorum patrum, jusqu’alors considérés comme parties intégrantes de la Sacra Pagina et interprétés avec des outils propres à la théologie, commence progressivement à se transformer en une interprétation juridique autonome qui s’articule sur des critères internes au droit lui-même (Kuttner, 1953 ; Fantappié, 2017).
Les modèles interprétatifs traditionnels sont transformés et adaptés à la nouvelle méthode d’enseignement des canons dans les écoles, dans le but d’harmoniser les normes et de résoudre leurs contradictions afin de clarifier et d’autonomiser les problèmes juridiques. C’est dans les écoles que se déroule le processus révolutionnaire d’autonomisation du ius canonicum, qui commence à se distinguer « de la masse jusqu’alors indifférenciée des Sciences de la divinité » (Le Bras, Lefebvre, Rambaud, 1965). Les maîtres s’attachent à comprendre la nature théorique et technique des normes canoniques afin d’enseigner une scientia, qui trouve ses sources dans le Decretum, distincte du reste du savoir philosophico-théologique.
Il serait anachronique et trompeur de penser que, dès le début, les interprètes ont agi comme des juristes au sens propre du terme. La formation des décrétistes qui abordent l’étude du Decretum était encore liée aux arts libéraux et à la théologie. Surtout dans la première phase, les canonistes n’ont pas connaissance des techniques d’interprétation présentes dans le droit romano-justinien que les glossateurs bolonais apprennent simultanément. Les formes d’interpretatio s’inspirent de la tradition théologico-philosophique et révèlent l’effort réel de recherche d’outils adaptés à un nouveau contexte pour les interprètes eux-mêmes, des outils qui permettent de définir plus clairement les limites du langage juridique et de s’éloigner du langage théologique.
Donner une forme juridique aux premières pages du Decretum, au concept de droit naturel quod in Lege et Evangelio continetur, et définir la sphère du droit divin et du droit humain a exigé un effort titanesque. Il a également fallu clarifier la soumission de l’action humaine à la dimension morale et religieuse. Cela impliquait le risque évident de dépasser les limites des Saintes Écritures et du divin, qui imprégnait alors la vie des hommes. Pourtant, ces maîtres ont réussi, avec une lucidité extraordinaire, à tracer les contours fondamentaux de l’ordre temporel du droit.
La complexité des formes de l’interpretatio
Chaque jour, dans les écoles, les professeurs qui lisent enrichissent la littera legis de leur interpretatio. Dans le même temps, les élèves consignent par écrit les traces de ce qu’ils ont entendu afin d’aider et de soutenir leur mémoire : les normes sont flanquées de gloses, brocards, summae, quaestiones et commentaria. A l’instar de la vision du droit comme corpus ordonné et ordonnateur, saisi dans sa dimension vitale mutable, capable de croître au fil des générations et de représenter la projection humaine de règles sculptées dans la dimension divine, chaque écriture d’usage est conçue pour être révisée et reconstruite, car les normes doivent être commentées pour s’adapter aux transformations et aux changements de la société.
Les premiers écrits sont constitués d’excerpta, d’annotations non homogènes qui se résument à seulement quelques causae du Decretum que, probablement en raison de leur contenu, les maîtres ont intérêt à comprendre pour mieux les expliquer à leurs étudiants. La nécessité d’interpréter les normes recueillies par Gratien, de revoir et de relire les réflexions du Magister, de commenter et de repenser leur contenu transforme presque immédiatement l’approche du texte normatif, qui s’enrichit de glossae, notabilia, brocarda, quaestiones et abbreviationes, solutiones contrariorum et distinctiones. Malgré leur coïncidence formelle, ces outils interprétatifs ne peuvent pas se superposer abstraitement et n’ont pas toujours la même nature schématique adoptée par les glossateurs civilistes (Meyer, 2000).
À ce stade, la nécessité de rechercher l’ordre naturel exprimé dans les sources normatives canoniques pousse les interprètes à articuler leurs textes selon une méthode analytique qui leur permet de comprendre mot à mot l’essence juridique des canons. Au fil du temps, l’approche analytique, insuffisante en soi, a été flanquée d’une méthode plus systématique et organisée adoptée dans les Summae, dans le grand apparat de gloses et ensuite dans les commentaria monumentaux des célebres interprètes du XIVe siècle. Le rapport constant entre les écoles et la pratique et la nécessité de donner une apparence juridique aux faits quotidiens ont nourri la formation d’une génération de juristes résolument éloignés de toute spéculation abstraite et formelle. Le phénomène juridique vit et se manifeste dans cette confrontation continue d’opiniones et ne reste pas confiné à l’exercice rhétorique du raisonnement abstrait. Il est indissociable des facteurs humains du droit, il vit et se nourrit d’oppositions, de doutes, et expérimente des mécanismes de recherche d’une vérité qui émerge du conflit des perspectives. Le monde juridique médiéval est construit sur la logique du probable, sur la contraposition dialectique du raisonnement pour donner des solutions qui, à leur tour, peuvent être revues et corrigées (Giuliani, 1966 ; Bellomo, 2000)
Pour toutes ces raisons, les critères classiques utilisés pour distinguer une summa d’un commentaire ou d’un apparat s’avèrent souvent insuffisants. Il n’est pas rare que dans un même texte, apparemment homogène, l’auteur utilise différents instruments d’interprétation. Beaucoup de ces textes exégétiques présentent des caractéristiques similaires, certains relèvent d’une rédaction définitive, mais chacun d’entre eux répond à des besoins différents, à des approches personnelles que l’auteur, les auteurs, les professeurs, les étudiants donnent à l’écriture, reprenant et recomposant des enseignements entendus ou transmis. Il arrive en effet que des summae brèves et synthétiques soient annotées en marge du Decretum, à côté des gloses, pour être ensuite séparées du texte normatif et diffusées sous la forme d’un commentaire autonome. Par conséquent, pour comprendre le sens véritable de ces écrits, il est crucial d’identifier et de reconstruire la transmission et la forme de circulation du texte (das Überlieferungsgeschichtliche ; Kuttner, 1937) afin de reconnaître, par exemple, le commentaire autonome d’un auteur individuel exprimé sous forme de résumé et le différencier d’un apparatus glossarum, pour comprendre l’inclusion d’une quaestio dans un commentaire et de saisir le sens global de la position exprimée par son auteur.
Les Summae
Traditionnellement, la première Summa au Decretum est attribuée à Paucapalea (fl. 1140) (Pennington-Müller, 2008), probablement le premier élève de Gratien. L’ouvrage rédigé à Bologne entre 1140 et 1150 est composé d’excerpta du Décret et d’historiae bibliques. Il peut être considéré à ce jour comme l’une des premières expressions du mouvement d’initiation à l’interprétation canonique, mais peut difficilement être qualifié de summa au sens propre (Viejo-Ximénez, 2012 ; Fiori, 2013). Selon toute vraisemblance, il s’agit d’un ouvrage à vocation pédagogique (Schulte, 1890 ; Pennington-Müller, 2008) qui a eu le mérite d’avoir été le premier à mettre à jour un champ inexploré. Il suffit de penser aux considérations fructueuses que Paucapalea consacre dans son Prologue à l’ordo iudiciarius qui ont initié des réflexions ultérieures sur un sujet jusqu’alors presque inconnu (Pennington, 1993).
Lorsque la saison de l’enseignement du droit canonique commence à Bologne, la nécessité d’ordonner et de synthétiser les opinions favorise la floraison d’ouvrages de nature plus systématique qui ont été transmis et diffusés de manière autonome par rapport au Decretum, précision faite que, malgré leur nom, ces textes combinent, au moins à ce stade, des apparats de gloses et de summae (Kuttner, 1937).
Le plus ancien peut être considéré comme l’ouvrage intitulé Stroma Rolandi ex Decretorum corpore carptum de Rolandus 1 (fl. 1150-1160), magister bononiensis actif à Bologne dès 1154, à ne pas confondre avec Rolando Baldinelli, futur pape Alexandre III, actif dans la seconde moitié du XIIe siècle (Weigand, 1980 ; Sorice, 2012). Le travail continu de révision et d’ajouts à la Summa effectué au fil des ans par le magister bolonais, dont on connaît plusieurs recensions, reflète les caractéristiques d’une pensée formulée dans le cadre d’un enseignement, un work in progress de nature composite et complexe difficilement identifiable comme une œuvre unique (Kuttner, 1994). À Rolandus appartiennent également un nombre important de gloses et de quaestiones, ces dernières en collaboration avec Metellus (Weigand, 1986), et les Sententiae magistri Rolandi, publiées cependant sous le nom d’Alexandre III (Gielt, 1969).
Presque dans les mêmes années, à Bologne vers 1164, fut rédigée la Summa decretorum du magister Rufinus (fl. c. 1150-1190), considérée comme le premier grand ouvrage unifié sur le Decretum de Gratien (Gouron, 1986). Laissant de côté l’identité du juriste qui fait l’objet d’un débat passionné (Fiori, 2019), on s’accorde à dire qu’il enseigne à Bologne et que son école jouit d’une excellente réputation. Sa summa devient le prototype d’un modèle interprétatif alternatif fondé sur la méthode analytico-exégétique propre aux écoles de Bologne et sur la nécessité simultanée de commenter le contenu du Decretum dans une perspective systématique et synthétique (Kuttner, 1937). L’influence de Paucapalea et de Rolandus transparaît au sein de l’œuvre. On y trouve aussi quelques rares références au droit lombard (Lombarda), qui démontrent le lien du maître avec la réalité de son temps. Ce qui est certainement nouveau dans l’œuvre de Rufinus, c’est sa connaissance et son utilisation du droit romano-justinien et du travail de glossateurs qui lui sont contemporains. Cependant, il garde une certaine distance par rapport à ces deux éléments, ce qui est compréhensible pour un expert en Sacra Pagina qui lit des sources romaines « païennes », que les civilistes continuent à décliner et à harmoniser avec les principes chrétiens. Dès l’ouverture de sa Summa (D.1, pr. c.1), en effet, Rufinus critique sévèrement les legum periti pour leur interprétation du droit naturel et du principe vim cum vi repellere licet, qui s’oppose ouvertement à l’idée de ius naturale contenue dans le Decretum Gratiani. La renommée qui accompagne son enseignement garantit l’énorme succès de sa Summa, également en raison des thèmes pertinents et significatifs abordés par le magister dans une perspective qui parvient à harmoniser, en phase avec les changements en cours, la tradition des enseignements théologiques avec le devenir des normes canoniques, antiquitas et modernitas (Thier, 2020).
Quelques années plus tard, Étienne, évêque de Tournai (1192-1203) écrit sa propre Summa. Étienne est né à Orléans en 1128. Vers 1150, il étudie à Bologne au sein de l’école de Bulgarus (m. 1166), un célèbre glossateur civiliste auprès duquel il apprend le droit romano-justinien (Viejo-Ximénez, 2012). Bien qu’il ne mentionne jamais directement ses maîtres, l’influence de la pensée de Rufinus, qu’il a probablement entendu à Chartres ou à Paris, est certaine. Sa culture et ses compétences littéraires font de lui une figure de proue dans les cercles séculiers et ecclésiastiques, où circulent et sont appréciés ses lettres et ses Sermones, qui témoignent de l’élégance de son écriture et de sa maîtrise des procédés rhétoriques (Pennington, 2019). Sa Summa 2 est rédigée entre 1165 et 1167 (Pennington-Müller, 2008). Dès le prologue, l’intention de systématiser l’étude de la théologie avec le droit en poursuivant le travail entrepris dans la Summa de Rufinus est claire. Son œuvre se présente également comme un texte dans lequel la pensée de l’auteur n’est pas le résultat d’un travail isolé, mais témoigne au contraire de son expérience d’étudiant et d’enseignant. À de nombreux endroits, il cite les opinions précédemment exprimées dans certaines de ses nombreuses gloses marginales, déjà annexées au Decretum. Contrairement à Rufinus, Étienne utilise largement le droit romano-justinien qu’il a étudié in schola Bulgari pour comparer différents principes et faits, comme c’est le cas, par exemple, pour le droit naturel (Weigand, 1986). Il n’est pas faux de penser que le juriste a continué à réviser sa Summa bien après 1170, réexaminant nombre de ses positions (Weigand, 1991). Étienne a contribué de manière décisive à la circulation de la pensée de l’école bolonaise dans une grande partie de l’Europe, mais surtout dans le milieu français, favorisant certainement la formation de l’école anglo-normande dont nous allons parler.
Dans les années 1270, les écoles bolonaises sont très actives, les écrits exégétiques du Decretum se multiplient et les gloses ainsi que les summae se combinent dans différentes compositions. L’œuvre de Iohannes Faventinus en est un exemple. La biographie du maître (m. c. 1190 ; peut-être évêque de Faenza entre 1174-1177) est entourée de mystères, bien que son activité d’interprète soit extrêmement féconde (Pennington et Müller, 2008). Probablement rédigée en 1171, sa Summa est peut-être l’un des exemples les plus clairs d’un « texte vivant » dans lequel des gloses-apparatus se mêlent à des exposés systématiques au sujet de certaines parties du Decretum (Kuttner, 1937). Le nombre d’exemplaires en circulation de cette Summa est également surprenant, car il démontre le succès de la pensée de Iohannes et la faveur de ses élèves (y compris, par exemple, Bernardus Papiensis) malgré les accusations de manque d’originalité portées contre lui par les philologues du XIXe siècle en raison de la dépendance du texte à l’égard de Rufinus et d’Étienne de Tournai (accusations également portées contre la plupart des décrétistes médiévaux et fondées sur une méconnaissance de la nature de ces œuvres). Des études récentes ont démontré la contribution originale de Iohannes sur l’institution du mariage, le procès et la culpabilité (Bukowska Gorgoni, 2001).
Dans l’effervescence de l’école de Bologne, le moment était venu de surmonter, d’une part, la méfiance à l’égard des leges extraneae (Corpus Iuris Civilis) et des interprétations des légistes, et d’autre part, de commencer à examiner les normae novae du droit canonique promulguées abondamment après la rédaction du Decretum. C’est avec cette dernière intention que Simon de Bisignano (fl. 1174-1179) rédige sa Summa entre 1177 et 1179. Ce manuscrit englobe les changements survenus dans les écoles juridiques bolonaises qui avaient surmonté la nécessité de donner une autonomie aux processus d’interprétation des normes du droit canonique et du droit romano-justinien. Simon, comme les autres interprètes après lui, fort du grand travail d’exégèse réalisé par les maîtres précédents, a utilisé les instruments disponibles pour sélectionner les canons à expliquer dans sa Summa, en les commentant également à la lumière des nouvelles décrétales et des nouveaux canons conciliaires (Aimone, 2014). Il donne ainsi vie à une œuvre originale, qu’il a lui-même voulu garder autonome par rapport à ses nombreuses gloses écrites en marge du Décret (Pennington-Müller, 2018).
Entre la fin des années 1180 et le début des années 1190, les transformations en cours affectent substantiellement l’exégèse des canonistes. La rédaction de la Compilatio I (1187-1191) par Bernardus Papiensis a renforcé la nécessité (déjà pressentie par Simon) de se tourner vers le novum, sans pour autant rompre avec la tradition exégétique alors sédimentée sur les principes du Decretum. Bologne était alors devenu un centre européen d’étude du droit et deux générations de glossateurs civilistes avaient disséqué le contenu du Corpus Iuris Civilis. C’est dans ce contexte que la Summa Decretorum d’Huguccio (fl. 1180-1210) a vu le jour. Sa rédaction incarne le moment de synthèse et de systématisation de la pensée de ses prédécesseurs. Huguccio enseigne à Bologne pendant ces années, au moins jusqu’en 1190, date à laquelle il est nommé évêque de Ferrare. Selon l’hypothèse la plus vraisemblable, le canoniste Huguccio ne doit pas être confondu avec le grammairien Uguccione, auteur du Liber derivationum (Müller, 1994). Avec Huguccio, on assiste à un changement dans l’exégèse des canons, qui sont également relus à la lumière du droit de Justinien. Son travail joue ainsi un rôle déterminant dans le déplacement, rendu nécessaire par les besoins interprétatifs du ius novum, de la formation juridique des canonistes vers une connaissance approfondie du Corpus Iuris Civilis. Dans sa Summa, la culture et la formation du maître, pas seulement tournée vers la science juridique, convergent vers une connaissance approfondie de la Sacra Pagina, des Auctoritates et des classiques romains (Térence, Cicéron, Virgile). Dans sa structure, l’ouvrage s’écarte de l’ordre de Gratien pour aborder de manière systématique de nombreux nœuds doctrinaux complexes, afin de les rendre plus clairs pour ses élèves. Huguccio réussit à synthétiser la substance des thèmes abordés par ses prédécesseurs pour offrir aux lecteurs des opinions doctrinales qui harmonisent et ordonnent des problèmes controversés visant à clarifier, par exemple, le rapport entre l’Église et l’Empire, entre l’ordre spirituel et l’ordre temporel comme au sujet de la compétence de la juridiction ecclésiastique (Fiori, 2013 ; Bisanti-Sol, 2020).
L’ampleur du phénomène en Europe. Le cas des écoles transalpines
À partir de la fin des années 1150, dans le sillage de ce qui se passe à Bologne, on assiste à une prolifération des écoles dans toute l’Europe (Weigand, 2008). L’existence d’écoles où l’on lisait les canons et où l’on produisait de nombreuses gloses du Decretum est désormais bien établie tant dans le royame de France qu’en Rhénanie (Kuttner-Ratbone, 1949 ; Gouron, 1980 ; Landau, 1986).
L’école franco-rhénane
La diffusion de la Summa d’Étienne de Tournai à la fin des années 1160 favorise la création d’une école à Paris. Elle maintient un lien étroit avec les écoles ecclésiastiques où les clercs apprennent la grammaire, la philosophie et la théologie. En effet, l’usage d’un style rhétorique propre à ces milieux est encore fréquent (Meyer, 2000), et c’est au sein de ces écoles que les juristes professionnels doivent trouver leur place (Gouron, 1999). Ce n’est qu’à la fin du XIIe siècle qu’une dimension proprement juridique de l’enseignement et de l’interprétation s’impose dans l’école française. Dans les dernières summae, on note l’utilisation directe du droit romain et la citation de la pensée des glossateurs bolonais pour résoudre des problèmes non traités par les normes canoniques. La production de cette période se distingue par la capacité des maîtres français à combiner la réflexion philosophique et théologique avec la dimension strictement juridique, un aspect qui caractérise l’exégèse des canonistes français et la distingue des maîtres bolonais (Lefebvre-Teillard, 2008).
L’une des premières œuvres interprétatives autonomes de cette école est la Summa ‘Magister Gratianus in hoc opere’, également connue sous le nom de Summa Parisiensis 3 , composée vers 1170 (Kuttner, 1937). Comme toutes les summae de l’époque, l’auteur anonyme s’inspire largement des maîtres bolonais, en particulier Rolandus, Rufinus et, bien sûr, Étienne de Tournai. Il ne mentionne que rarement le Codex de Justinien (Weigand, 2008).
Après la rédaction de la Summa Parisiensis, un auteur également anonyme rédige une Summa ‘Inperatorie maiestati’ ou Summa Monacensis (1175-1178), dont l’appartenance à l’école française ne peut être établie 4 . La complexité de l’organisation interne et de l’histoire du texte conduit à penser la Summa comme une miscellanée de gloses rassemblées par un même maître à l’intention de ses élèves (Weigand, 2018).
La Summa Antiquitate et tempore (vers 1170) doit être retenue parce que : 1) en son sein émerge le processus de contamination entre ius civile et ius canonicum qui s’exprime par l’utilisation des figurae du droit romain pour clarifier le contenu des canons, et 2) d’autres œuvres exégétiques s’en inspirent. C’est le cas, par exemple, des Distinctiones ‘Si mulier eadem hora’ seu Monacenses (vers 1170). L’œuvre, qui ne peut être identifiée au genre littéraire des Distinctiones, est composée par un maître originaire de Westphalie mais qui a étudié dans le milieu parisien. La dépendance de l’œuvre à l’égard de Paris est évidente en raison de l’utilisation abondante de la Summa Parisiensis et de la Summa Antiquitate et tempore, sur lesquelles le maître anonyme articule une grande partie du texte selon un schéma typique de compositions en mosaïque. Malgré sa provenance française évidente, il y a une référence significative à l’enseignement que Gérard Pucelle (dont nous parlerons plus tard) donne à Cologne.
Voici un exercice pour s’entraîner à lire et à comprendre un passage des Distinctiones ‘Si mulier eadem hora’ seu Monacenses.
À la fin des années 1180 est apparue la Summa Reverentia sacrorum canonum, probablement composée à Reims entre 1185-1187 (Wei, 2018 ; avec quelques doutes Landau, ibid. 2018). La summa a suscité l’intérêt des chercheurs en raison de ses positions originales sur le droit naturel, de son utilisation et de son commentaire de seize Paleae. Le décrétiste, anonyme, s’inspire des commentaires de Iohannes Faventinus et de Simon de Bisignano (Wei, 2018). Vers 1186 est composée la Summa ‘Omnis qui iuste iudicat’ seu Lipsiensis 5 , elle aussi largement inspirée de la pensée des maîtres bolonais avec l’omniprésent Étienne de Tournai.
En ce qui concerne une grande partie de cette production, il est utile de rappeler que beaucoup de ces summae, bien que définies comme telles parce qu’elles manifestent une plus grande stabilité et fixité, rassemblent souvent en leur sein des formes exégétiques de diverses natures, quaestiones, distinctiones, casus, ou sont plus proches d’un apparatus. L’exemple le plus évident est celui de la Summa Animal est substantia ou Summa Bambergensis (vers 1206-1216), dont trois versions textuelles différentes ont été identifiées. Elles font davantage penser à un apparatus plutôt qu’à une summa (Coppens, 2009).
Bien qu’italien de naissance, Sicardus Cremonensis (c. 1155-1215, évêque de Crémone à partir de 1185) est traditionnellement considéré comme un maître de l’école anglo-normande. Sicardus, qui a probablement étudié à Bologne ou à Paris en 1180, est chanoine de la cathédrale de Mayence où il enseigne peut-être à l’école épiscopale. C’est précisément pendant son séjour en Rhénanie entre 1179 et 1183 qu’il rédige sa Summa, un texte à caractère unitaire et systématique destiné à l’enseignement, à l’intérieur duquel l’utilisation de quaestiones et de distinctiones sert à contextualiser et à expliquer les sujets traités (Fiori, 2013). Sicardus représente un véritable intermédiaire entre les canonistes ultramontains et l’école bolonaise comme en témoigne le fait que sa Summa soit souvent copiée aux côtés de celle de Simon de Bisignano.
Presque simultanément à la formation de l’école française, l’intérêt pour l’étude du droit canonique s’est développé en Rhénanie. L’impulsion est donnée par Gérard Pucelle (c. 1115-1183, évêque de Coventry à partir de 1183), probablement Anglais d’origine qui a étudié à Paris, où il a également enseigné entre 1155 et 1165. Accompagnant Thomas Becket lors de son exil en France, il se rend également à Cologne où il enseigne d’abord entre 1165 et 1168, et très probablement entre 1180 et 1182. À son retour en Angleterre en 1168, il continue de servir l’archevêché de Canterbury. L’enseignement de Pucelle a favorisé la prolifération, dans les années 1170, de nombreuses summae dans la région franco-rhénane (Kuttner-Ratbone, 1949). La Summa ‘Elegantius in Iure divino’, mieux connue sous le nom de Summa Coloniensis 6 (vers 1169), gravite certainement autour de l’école de Cologne. L’auteur anonyme organise et sélectionne les canons commentés de manière claire afin d’offrir aux étudiants une synthèse facile : « nostra summa paucis ad multa iuvetur » (Pars. I, p.1). Le texte s’appuie sur les Summae de Rufinus et d’Étienne de Tournai, la Summa Parisiensis et les gloses de l’école bolonaise.
La production substantielle des summae rédigées à cette époque, et qu’on peut rattacher directement ou indirectement à l’enseignement de Gérard Pucelle, a permis de supposer qu’entre 1169 et 1190 environ, Cologne était un centre de référence à la formation des canonistes de l’époque (Landau, 2008).
L’école anglo-normande
À la fin des années 1160, l’étude du droit canonique suscite également un intérêt croissant en territoire anglo-saxon, alimenté par le retour au pays de nombreux étudiants anglais qui avaient étudié en Europe (Kutter-Rathbone, 1949).
L’introduction du droit romain sur le territoire anglais est attribuée à Vacarius (c. 1115/20 – c. 1200 ?), juriste formé à l’école des légistes bolonais, qui enseigne les leges dans les écoles ecclésiastiques à partir de 1149, probablement à Oxford (Loschiavo, 2020). Vacarius voyage beaucoup en Europe, s’installe en France et entretient certainement des contacts avec Pucelle. Il rédige entre 1166 et 1170 une Summa de matrimonio qui apparaît plus comme un ouvrage composé par un civiliste expert en leges justiniennes que comme un commentaire de droit canonique (Kutter-Rathbone, 1949). Ce n’est donc pas à lui qu’il faut attribuer l’introduction de l’étude des canons en territoire anglo-saxon.
En effet, la circulation des gloses, quaestiones et brocarda de l’école française et en particulier de la Summa ‘Omnis qui iuste iudicat’ seu Lipsiensis a alimenté la formation des canonistes anglais. Une place de choix est occupée par le maître Honorius (m. c. 1210/13), originaire du Kent, qui, entre 1185 et 1195, a étudié à Paris où il a probablement enseigné. Durant cette période, il rédige la Summa ‘de quaestionibus decretalibus tractaturi’ et la Summa ‘de iure canonico tractaturus’ (Sorice, 2012). Sa Summa quaestionum (1186-1188) est construite selon une méthode originale et innovante. Divisée en quatre parties ou distinctiones (procédure, ordres et offices ecclésiastiques, mariage), elle adopte un classement, interne à chaque distinctio, en titres, composés d’un grand nombre de quaestiones. Ces titres sont reliés par des summulae et des continuationes se rapportant aux concepts de base exprimés dans le titre précédent. Dans la praefatio de la Summa quaestionum, Honorius indique au lecteur que la voie suivie et utilisée pour commenter les canons de Gratien est celle des quaestiones decretales. Elles n’expriment cependant pas le genre littéraire indiqué par le maître mais reflètent plutôt la méthode des quaestiones civilistes scolastiques, généralement basées sur la nécessité concrète de résoudre des cas réels. Dans d’autres cas, le magister explique les règles de droit sous la forme d’une question et d’une réponse et propose à la fin différentes solutions dans le but de faire connaître aussi les opinions qui divergent. La Summa ‘de iure canonico tractaturus’, malgré les nombreuses coïncidences textuelles avec la Summa quaestionum, n’en retrace pas les grandes lignes. Elle apparaît plutôt comme une source précieuse mettant à jour des réflexions de la doctrine sur les cas les plus controversés et débattus, où les anciens doutes sont confrontés à de nouvelles opiniones. Parmi les auteurs cités, Gandulphus (fl. 1160-1170) et Iohannes Faventinus apparaissent fréquemment, rarement d’autres glossateurs. Parmi les théologiens, on retrouve Pierre le Chantre (m. 1197) et Adam de Saint Victor (m. 1192) (Kutter-Rathbone, 1949).
Vers de nouvelles exigences et de nouveaux modèles d’interprétation : le ius commune et les décrétalistes
Au début du XIIIe siècle, le droit canonique fait partie intégrante de l’enseignement universitaire et les étudiants obtiennent des diplômes in utroque iure, en droit civil et en droit canonique. La scientia canonique, jusqu’alors concentrée, à quelques rares exceptions près, sur l’interprétation du Decretum, est confrontée au développement de la nouvelle production normative de l’Église.
Nous entrons dans l’âge « mûr » du ius commune, un âge dans lequel les juristes interprètent les deux systèmes de droit civil et de droit canonique non pas comme alternatifs et conflictuels, mais comme interconnectés. La vision du droit se concentre sur la dimension universelle de l’utrumque ius en tant que projection terrestre des deux autorités, le pape et l’empereur, et dont la connaissance est considérée comme indispensable dans l’enseignement du droit.
Les premiers signes de la transformation en cours sont visibles à la fin du XIIe siècle, lorsque Bernardus Papiensis (m. 1213 ; évêque de Faenza en 1192, puis de Pavie en 1198), sur la base des enseignements de son maître Huguccio de Pise, rédige la première Summa decretalium au cours de son épiscopat à Faenza. La Summa, créée pour les écoles, suit l’ordre déjà adopté dans son Breviarium Extravagantium (voir l’entrée ci-dessous Compilatio I). Les décrétales y sont commentées dans le même ordre, avec une méthode claire et compréhensible, dans le style caractéristique des œuvres de Bernardus. Dans l’interprétation des cas traités, le canoniste se sert du Decretum et des enseignements de ses prédécesseurs Rufinus, Iohannes Faventinus et surtout Huguccio. L’innovation tient dans un recours constant au droit romain et aux outils d’interprétation qu’il fournit pour élaborer des solutions aux cas complexes que les décrets envisagent. Avec ce nouvel ordre donné au Breviarium et à sa Summa, c’est certainement le travail de Bernardus qui inaugure le temps des décrétalistes.
Les premières décennies du XIIIe siècle marquent la suprématie de l’école juridique bolonaise dans toute l’Europe. La ville de Bologne devient un centre d’attraction international pour l’étude du ius commune : les étudiants étudient le Corpus Iuris Civilis et se confrontent à la pensée que les glossateurs civilistes, avec leurs gloses, ont exprimée et expriment encore sur les figurae juridiques contenues dans les Libri Legales. En même temps, l’enseignement du Decretum s’accompagne de la nécessité de connaître le contenu de la quantité considérable de textes du ius novum. Ces textes ont été promulgués dans ces années-là par les papes et les conciles et ont été rassemblés dans divers recueils connus sous le nom de Quinque Compilationes Antiquae. Le processus d’intégration entre les deux systèmes juridiques est inévitable et immédiat.
Une nouvelle génération de canonistes naît, capable de coordonner les normes et les pensées dans une perspective juridique systématique qui s’éloigne définitivement de la dimension interprétative théologique encore présente dans les travaux antérieurs. Entre 1210 et 1230, on assiste à une production extraordinaire d’œuvres canoniques ; des summae sont rédigées par des juristes de toute l’Europe, parmi lesquels on peut citer Richardus Anglicus et Alanus Anglicus pour l’Angleterre et les espagnols Laurentius Hispanus, Bernardus Compostellanus antiquus, Vincentius Hispanus et Iohannes de Deo.
Cette génération d’auteurs de summae s’éteint avec la publication en 1234 du Liber extra de Grégoire IX. La glossa ordinaria délimite avec précision les frontières de la théologie et déplace la production scientifique de manière plus marquée en faveur du droit. À la frontière se trouve la Summa super titulis Decretalium de Goffredus de Trani (m. 1245), juriste de l’école bolonaise et élève d’Azo et d’Huguccio (Bertram, 2013). La Summa (1241-1243) suit une méthode didactique bien établie : continuatio, diffinitio, tractatus, quaestiones, notabilia, summarium. Grâce à sa structure et à la clarté de son exposé, elle se répand rapidement dans les écoles et devient le texte didactique le plus populaire, comme en témoignent les quelque 300 manuscrits qui nous sont parvenus.
Pour aller plus loin dans l’étude de la Summa super titulis Decretalium de Goffredus, voir la reproduction digitale du manuscrit du Mont Cassin 266 proposée en italien par Martin Bertram.
Le changement de rythme qui suivit la publication du monumental recueil de décrétales officielles du pape rend inévitable une transformation de l’approche des nouveaux textes normatifs, une approche qui reflétait les changements survenus dans les écoles, au sein desquelles les quaestiones assument un rôle substantiel et le raisonnement des doctores absorbe les systèmes logiques d’Abélard. Les premiers signes de ce changement se lisent déjà dans l’œuvre interprétative de Sinibaldus Fieschi (ante 1200-1254) qui, avant d’accéder au trône pontifical sous le nom d’Innocent IV, s’est formé in utroque iure à Bologne (1213-1225) en écoutant des juristes de renom tels que les canonistes Laurentius Hispanus, Vincentius Hispanus, Iacobus de Albenga et Iohannes Teutonicus et les civilistes Azo, Accurse et Iacobus Balduini. Sinibaldus a rédigé un solide et important Apparatus in quinque libros decretalium, qui, sous la forme d’un commentaire systématique, rassemble ses contributions juridiques novatrices, dont la célèbre doctrine sur la persona ficta (Melloni, 2013).
Henricus de Segusio : Summa et Commentarium
À la fin du XIIIe siècle, plus d’un juriste s’est disputé la réputation de grand canoniste et parmi eux se trouvait certainement Henricus de Segusio dit « Hostiensis » (c. 1200-1271, évêque de Sisteron à partir de 1244, évêque d’Embrun entre 1250 et 1261 et cardinal-évêque d’Ostie à partir de 1262). Henricus a étudié à Bologne et a ensuite enseigné in decretalibus à Paris (Pennington, 1993). Il n’a pas choisi une carrière universitaire, mais ses liens avec les maîtres bolonais étaient forts et fréquents, tout comme ses liens avec la curie pontificale et les cours royales française et anglaise. Son influence découle de ses compétences juridiques incontestées et va au-delà des fonctions ecclésiastiques qu’il occupe. Son œuvre la plus réussie est certainement la Summa (1230 ?-1253), connue aujourd’hui sous le nom de Summa Aurea, titre qui n’apparaît pour la première fois que dans l’édition romaine de 1477. Henricus reprend systématiquement les titres des Décrétales de Grégoire IX, en y ajoutant une cinquantaine de nouveaux titres. Sa Summa confirme l’absorption définitive des normes justiniennes dans la structure interprétative de la production scientifique canonique. Celle-ci utilise désormais de manière constante non seulement les leges, mais aussi les interprétations des glossateurs civilistes à leur sujet. En retour, ces derniers ont commencé à s’intéresser à des institutions propres au droit canonique, jusqu’alors étrangères à leurs travaux.
Dans sa Summa, Henricus consacre le lien entre les deux droits universels, l’utrumque ius, dont l’interprète doit s’inspirer pour expliquer les figurae juridiques, avec un regard constant sur l’equitas, qui sert à corriger la dureté du ius civile et son application rigide dans les cas où le salus animarum est en danger (Padovani, 2020). Henricus transfère sa brève expérience d’enseignant dans la Summa, et le texte devient l’œuvre la plus connue et la plus étudiée de cette génération de canonistes, à égalité avec la Summa d’Azo. Sa pensée ne se cristallise pas dans des spéculations abstraites, mais se transforme en s’adaptant aux différentes réalités rencontrées. Il est convaincu que les professeurs et les étudiants ne peuvent être des érudits dont le savoir est eloigné de l’interprétation des cas pratiques. Cette tendance est soutenue par l’utilisation de la technique interprétative de la quaestio comme méthode de résolution des cas les plus complexes, qui revient constamment dans la Summa, même sous une forme non isolée (Pennigton, 1986). Les canonistes, en effet, bien qu’avec quelques années de retard (vers 1180) par rapport aux civilistes, ont adopté la méthode des quaestiones dans les écoles. Cet espace est vital, car il permet aux normes du ius commune de rencontrer les faits du quotidien, qui prennent une forme juridique dans la recherche de solutiones compatibles (Bellomo, 2000 ; Fransen, 2002). Vers 1265, à la fin de sa vie, Henricus achève son Commentum super decretalibus ou Lectura. L’histoire du texte, transmise sous la forme d’une glose marginale dans le manuscrit d’Oxford, New College, 207 (Pennington, 1993), nous montre comment les écrits de l’époque ne peuvent pas être catalogués abstraitement, comme en témoignent également les différentes révisions de la Summa et de ses lecturae ou Commentaria que le cardinal lui-même envoyait aux écoles (Pennington, 2017).
Iohannes Andreae : Quaestiones et Commentaria
Nous sommes arrivés à l’époque d’un décrétalisme mûr qui a perfectionné et affiné les techniques d’interprétation en confiant également l’enseignement du droit canonique aux laïcs. C’est précisément Iohannes Andreae (1270-1348), un juriste laïc qui représente peut-être le mieux les transformations de la scientia canonistique à la fin du XIIIe siècle. Iohannes apprend le droit canonique auprès d’Egidius de Fuscarariis (fl. 1252-1289) et de Guido de Baysio (c. 1246/56-1313) en 1298 et devient doctor decretorum. Il étudie le droit civil à l’école de Martinus de Silimanis (c. 1250-1306) et de Ricardus Malombra (m. 1334). Il enseigne également le droit canonique à Bologne à partir de 1301, avec de brefs intermèdes à Pavie. Sa production canonique est immense, puisqu’il écrit des commentaires sur tous les recueils de décrets (Condorelli, 2012).
Ce genre littéraire qui s’impose dans l’école bolonaise trouve également ses limites dans la classification mentionnée ci-dessus. À partir de la seconde moitié du XIIIe siècle, l’utilisation du commentaire 7 est plus fréquente parce qu’il permet de systématiser l’exposé de manière plus discursive, en combinant ensemble gloses, summae et quaestiones, toujours dans une perspective qui n’est jamais spéculative, mais qui au contraire reflète de manière significative les expériences et les transformations de la didactique médiévale, qui trouve dans les salles de classe un moment de synthèse entre la science et la pratique
La transition, déjà perceptible dans les œuvres d’Henricus de Segusio et de Sinibaldus Fieschi, est plus évidente dans les textes de Iohannes Andreae, qui écrit des lecturae et des repetitiones qui circulent séparément dans les manuscrits sous le nom de commentaire (Pennington, 1988). La relation forte et incontournable avec un long enseignement marque sa production savante. Le juriste réussit, peut-être le premier parmi les canonistes, à créer un rapport étroit entre ius commune et iura propria qui se condense ouvertement dans le recours fréquent aux quaestiones disputatae dont Iohannes est maître. Cette pratique lui permet de donner une forme juridique, à la lumière des leges et des decretales, aux doutes interprétatifs qui investissent les normes (statuta) promulguées par les communes de l’Italie du Nord.
La série d’ouvrages s’ouvre avec l’Apparatus glossarum in Sextum (vers 1305), enrichi par la suite des Additiones qui donneront naissance à l’ouvrage connu sous le nom de Novella in Sextum (1338-1342). Il rédige également un apparatus sur les Clementinae (1322), constamment mis à jour par des apostillae. Il traite de la procédure dans ses Additiones ad Speculum Guillelmi Durantis (1338-1347). Son œuvre la plus célèbre, écrite entre 1311 et 1338, est la Novella in quinque Decretalium libros commentaria. Iohannes décrit lui-même l’objectif du commentaire, à savoir rationaliser la prolixité des opinions sédimentées sur le Liber extra à partir de 1234. Le commentaire suit le modèle bolonais de composition par mots-clés, à tel point que Iohannes lui-même le définit comme une novella compilatio glossarum, que résument les apparats de générations entières de canonistes enrichis d’opinions personnelles (Condorelli, 2012).
Le commentaire Novella in titulum de regulis iuris du Liber Sextus, également connu sous le nom de Quaestiones Mercuriales, est tout aussi important et doit être distingué de la Novella in Sextum, rédigée plus tôt, entre 1338 et 1342. Pour construire son commentaire sur les regulae iuris, Iohannes adopte une méthode singulière et peu commune. En effet, le texte n’est pas composé d’un recueil de ses quaestiones comme on l’a longtemps cru. Tout d’abord, le juriste ne suit pas l’ordre établi dans le De regulis iuris du Liber Sextus, mais organise les regulae par ordre alphabétique sur la base de leur incipit, suivi de son commentaire personnel. Il ajoute immédiatement après une ou plusieurs quaestiones que lui-même ou d’autres ont effectivement contestées in scholis et qu’il considère comme pertinentes pour la regula traitée. Tout aussi significatif est le fait qu’à la fin du commentaire des regulae canonistes, le juriste ajoute toujours des règles de droit civil qui commencent par la même littera que la règle précédemment commentée. Il est probable que Iohannes, bien avant la rédaction de la Novella, ait commencé à rassembler ses quaestiones, réunies par la suite dans le sylloge Quaestiones Mercuriales, utilisé ensuite, en perspective et avec un système logique différent, pour la rédaction du commentaire du De regulis iuris (Condorelli, 1992).
Pour un retour sur la tradition textuelle des Quaestiones Mercuriales, voir les différents liens de ce fichier.
L’histoire du texte, sa constante révision à la lumière des modifications normatives, parsemée d’ajouts et de changements, témoigne de l’évolution continue de la production scientifique des doctores médiévaux, qui se présente dans sa dimension la plus vivante de « texte ouvert » reflétant une manière d’interpréter et de construire le droit étroitement liée à la réalité de l’époque et fruit de la rencontre fructueuse des lecturae, des cas, des pratiques, des doutes et des solutiones qui se déroulaient au sein des universités.
Pour faire le point
- Quand et pourquoi l’étude du droit canonique est-elle devenue autonome ?
- Existe-t-il des différences entre la summa et le commentaire ?
- Quelles sont les principales caractéristiques des œuvres des canonistes ?
Note 1
La Summa Magister Rolandi a été publiée par Friedrich Thaner en 1984 pour la partie allant de C. 1 à C. 36 (Berlin, Staatsbibl. Savigny 14 et Stuttgart HB VI. 62). Elle est dépourvue de la première pars, découverte par la suite dans le manuscrit Stuttgart HB VI. 63, unique témoin complet de la Summa (Kuttner, 1937).
Note 2
La Summa a une tradition textuelle complexe. Selon Stephan Kuttner (1955, 1958), en effet, la troisième partie sur le De consacratione contenue dans l’édition critique réalisée par Schulte (1891) n’est pas l’œuvre de l’érudit de Tournai (le Tornacense). Elle serait plutôt liée à la Summa Fecit Moyses tabernaculum, un texte rédigé dans un contexte français.
Note 3
Édition de l’unique manuscrit Bamberg, Staatbibl. can. 36 dans Terence P. McLaughlin, C.S.B., The Summa Parisiensis on the Decretum Gratiani, Pontifical Institute of Mediaeval Studies, Toronto, Canada, 1952, p. XXXIV, 272.
Note 4
Selon P. Landau (Landau, 2006), l’auteur inconnu de la Summa doit être identifié comme Rodoicus Modicipassus, un canoniste de l’école anglo-normande. Cependant, de nombreux doutes persistent à ce sujet (Bertram, 2020).
Note 5
Édition Summa ‘Omnis qui iuste iudicat’ sive Lipsiensis, I-II, R. Weigand, P. Landau-W. Kozur (edd.), Monumenta Iuris Canonici, Series A Corpus Glossatorum 7, 2007/2012.
Note 6
La Summa a été éditée par G. Fransen – S. Kuttner (ed.), Summa ‘Elegantius in iure divino’ seu Coloniensis, Monumenta Iuris Canonici, Series A Corpus Glossatorum, vol. 1, 1969; Pars II (1978; Pars III (1986) Pars IV (1990).
Note 7
Glossa et commentum sont perçus comme deux manières différentes d’annoter la loi dès la seconde moitié du XIIe siècle, comme le clarifie Huguccio de Pise : « distat inter commentum et glosam et translationem et textum. Commentum est expositio verborum iuncturam non considerans, sed sensum: deservit enim expositioni sententie alicuius libri et non constructioni littere. Accipitur quandoque commentum largius, scilicet pro quolibet libro et tunc sic diffinitur: commentum est plurimorum studio vel doctrina in mente habitorum in unum collectio; glosa est expositio sententie et ipsius littere, que non solum sententia sed etiam verba attendit, quasi expositio sententie ipsius litteram continuans et exponens […] » (Uguccione
da Pisa, Derivationes, I-II, E. Cecchini – G. Arbizzoni – S. Lanciotti – G. Nonni – M.G. Sassi – A. Tontini (éds.), Edizione nazionale dei testi mediolatini 2 ; Firenze, SISMEL, Edizioni del Galluzzo, 2004, II p. 536, v. glossa).
L’école du commentaire se développe à Bologne à la fin du XIIIe siècle. La complexité et la diversité des phénomènes politiques, économiques et sociaux en constante transformation exigent une nouvelle approche juridique, remettant en question l’exégèse précédente, qui visait à créer un ordre interne à la littera du Corpus Iuris Civilis et des recueils de droit canonique. Les juristes, reconnaissant l’importance des apparats ordinaires comme lien entre le texte normatif et la pratique, commencent à utiliser de nouveaux outils pour renouveler l’enseignement. L’objectif des cours universitaires se déplace progressivement vers la recherche de la ratio afin de l’adapter aux nouvelles réalités.
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